Genre : horreur (interdit aux - 12 ans)
Année : 2018
Durée : 1h33
Synopsis : Le docteur Klaus Van Etten expérimente sur des requins-bouledogues malgré l'avis contraire des experts maritimes. Mais les requins se libèrent et font des ravages.
La critique :
Toujours la même ritournelle... En 1975, Steven Spielberg réalise Les Dents de la Mer, soit Jaws dans la langue de Shakespeare, et réinvente le genre agression animale en se polarisant sur des disparitions en pleine mer de touristes à proximité d'une station balnéaire. Pourtant, Martin Brody, le chef de police de la ville d'Amity, prévient ses hiérarques. Ses disparitions inopportunes sont forcément l'oeuvre d'un requin aux incroyables rotondités, mais ses subordonnés ne l'oient pas de cette oreille et envoient à la mort plusieurs nageurs en déveine.
Pour Steven Spielberg, le vrai requin, ce n'est pas cet animal aquatique qui répond à ses pulsions primitives et à son instinct de survie, mais ces capitalistes et ces édiles politiques avides et cupides. Evidemment, Les Dents de la Mer inspire et engendre de nombreux avatars.
La Mort au Large (Enzo G. Castellari, 1981), Piranhas (Joe Dante, 1978) ou encore Killer Crocodile (Fabrizio De Angelis, 1989) sont autant de tentatives, peu ou prou perspicaces, de nager (c'est le cas de le dire) dans le sillage et le continuum de Jaws. Après une période de vaches maigres, l'agression aquatique réitère les animosités vers la fin des années 1990 avec Peur Bleue (Renny Harlin, 1999), soit Deep Blue Sea de son titre originel.
Pour Renny Harlin, pas question de contrarier l'omnipotence de Les Dents de la Mer. Bon nombre de réalisateurs se sont hasardés sur ce chemin escarpé, l'exercice relevant de la vanité et de la chimère. Pour le metteur en scène émérite, le but est surtout de mettre en exergue une nouvelle race de squales échevelés. Désormais, la science et la biologie sont capables de dupliquer les connexions neuronales de nos chers requins boulimiques.
Evidemment, un tep script tient de la faribole et de la petite fantaisie inconséquente. A contrario, cette série B lucrative, qui se paie tout de même le luxe de coaliser plusieurs stars hollywoodiennes confirmées ou en devenir (notamment Thomas Jane, Stellan Skarsgard et Samuel L. Jackson), se révèle d'une étonnante jubilation. Contre toute attente, le concept pittoresque de cette pellicule fonctionne, à condition de visionner Peur Bleue pour ce qu'il est, un film d'horreur et d'action qui mise avant tout sur la barbaque et la surenchère. Depuis le succès inopiné de Peur Bleue, les sociétés de production Asylum et Nu Image se sont largement chargés de dévoyer l'agression aquatique vers d'étonnantes tortuosités, les squales rimant désormais avec les nanars azimutés.
Presque vingt ans après la sortie de ce premier volet, les producteurs avisés corroborent la sortie d'une suite, soit Deep Blue Sea 2, et réalisée par les soins de Darin Scott en 2018.
Point de distribution dans les salles de cinéma. En outre, la production opte pour une sortie élusive via le support vidéo et le DTV (direct-to-video). Darin Scott est surtout connu (enfin connu... c'est un bien grand mot...) pour avoir sévi derrière des téléfilms et/ou des séries télévisées, entre autres La Vengeance d'une Mère (2016), Retrouvez ma Fille ! (2016), Paranormal Initiation (2012), ou encore Femmes Fatales (2011 - 2012). Bref, rien d'exceptionnel ni de spécialement éloquent à travers cette filmographie, laissant présager le pire, au mieux une série B atone.
C'est donc avec une certaine circonspection que l'on attendait (ou pas) Deep Blue Sea deuxième du nom. La distribution du film se compose de Danielle Savre, Rob Mayes, Michael Beach, Nathan Lynn, Kim Syster, Jeremy Jess Bodao et Darron Meyer.
Attention, SPOILERS ! Le docteur Klaus Van Etten expérimente sur des requins-bouledogues malgré l'avis contraire des experts maritimes. Le Docteur Misty Calhoun est dépêchée sur place et constate les effets délétères d'un sérum qui a pour but de décupler l'intelligence et l'instinct meurtrier de squales contrôlés par une sorte d'émetteur (ou d'implant) électronique. Mais les requins se regimbent contre leurs propres démiurges... A l'aune de cette exégèse, difficile de ne pas s'esclaffer devant un synopsis d'une telle indigence. Petite piqûre de rappel.
Le premier Deep Blue Sea fonctionnait lui aussi sur les mêmes aspérités. De facto, Deep Blue Sea 2 obéit à son tour aux mêmes rhétoriques. Par conséquent, prière de mettre votre cerveau de côté pour éventuellement apprécier cette nouvelle aventure.
Mais là où le premier volet pouvait s'enhardir de saynètes à la fois gore et truculentes, ce second chapitre pâtit de l'absence de Renny Harlin et d'acteurs plus ou moins investis dans leurs rôles respectifs. Le charme de Peur Bleue premier du nom reposait sur cette "nanardise" et cet aspect picaresque totalement assumés. Or, Deep Blue Sea 2 fait justement abstraction de cette goguenardise de jadis. Pis, le réalisateur, Darin Scott, s'enlise dans un scénario encore plus nébuleux.
Cette fois-ci, plus question de trouver un vaccin aux effets thaumaturgiques contre la maladie d'Alzheimer. Le scientifique et milliardaire Carl Durant souffre de paranoïa et imagine des scénarios apocalyptiques dans lesquels il serait question de la fin du monde et d'une intelligence artificielle qui anéantirait l'homme dans les prochaines années.
Pour endiguer ce phénomène à priori exponentiel (sic...), il faut donc développer le cerveau humain à travers des expérimentations sur les requins ! Bien conscient de l'inanité et de la vacuité de son synopsis, Darin Scott préfère se focaliser sur les animosités aquatiques. Contrairement au premier épisode, un certain effort a été déployé quant à la qualité des effets spéciaux et sur la complexion gargantuesque des squales affamés. Cette fois-ci, ce sont des requins-bouledogues qui crient famine, rêvent d'émancipation et assaillent nos escouade sous-marine qu'ils jugent responsables de leur état. Dès lors, Deep Blue Sea 2 se transmute en huis clos aquatique et n'est pas sans rappeler, par certaines assonances, la dialectique de Piranhas (précédemment mentionné) via l'apparition de petits requins-bouledogues venant s'immiscer à l'intérieur de la plateforme sous-marine.
Niveau gore, rien de neuf sous le soleil. Après une première demi-heure assez prolixe et fastidieuse, Deep Blue Sea 2 engage enfin les belligérances avec une certaine mansuétude, si bien que l'on fermera miséricordieusement les mirettes sur la chétivité du scénario. Certes, on relève, çà et là, quelques trouvailles sympathiques, à l'instar de ce père de famille qui voit sa future épouse se faire tortorer par des requins un peu trop gloutons. Certes, Deep Blue Sea 2 se révèle un tantinet supérieur au récent Open Water 3 : Cage Dive (Gerald Rascionato, 2017) ; une tâche peu ardue en l'occurrence. Mais, en l'état, on préférera largement opter pour son auguste devancier et ses habiles gaudrioles. Pas un navet ni un nanar, mais on s'en rapproche tout de même allègrement...
Note : 07.5/20
Alice In Oliver