Genre : action, drame, boxe
Année : 2019
Durée : 2h10
Synopsis : La vie est devenue un numéro d'équilibriste pour Adonis Creed. Entre ses obligations personnelles et son entraînement pour son prochain grand match, il est à la croisée des chemins. Et l'enjeu du combat est d'autant plus élevé que son rival est lié au passé de sa famille. Mais il peut compter sur la présence de Rocky Balboa à ses côtés : avec lui, il comprendra ce qui vaut la peine de se battre et découvrira qu'il n'y a rien de plus important que les valeurs familiales.
La critique :
L'histoire de l'une des sagas les plus proverbiales du noble Septième Art, soit celle consacrée aux tribulations du boxeur Rocky Balboa. A l'origine, rien ne prédestinait Sylvester Stallone, son acteur principal, et scénariste pour l'occasion, de triompher et d'ériger sa silhouette encore méconnue dans Rocky (John G. Avildsen, 1976). Pugnace, le comédien émérite devra ferrailler et accepter de se colleter avec l'oligarchie hollywoodienne de l'époque pour que son personnage ne soit pas usurpé par des acteurs beaucoup plus luminescents, entre autres Robert Redford, James Caan, Ryan O'Neal ou encore Burt Reynolds. C'est sûrement la raison pour laquelle le film doit se débattre avec un budget impécunieux. A priori, rien ou presque ne préfigure des jours cléments pour ce long-métrage débarqué de nulle part, si ce n'est de l'imagination fertile de son auguste démiurge.
A l'époque, Sylvester Stallone accepte toujours de besogner et de trimarder dans des séries B désargentées et/ou dans des productions absconses. Le comédien l'ignore encore, mais il tient le rôle le plus proéminent de sa carrière, celui qui va le propulser, dès ce tout premier chapitre, au firmament de la gloire. Dès lors, Stallone rempile et renfile les gants pour une franchise désormais lucrative. Indubitablement, la trajectoire de ce personnage, à la fois amène et insolite, s'approxime à celui de Stallone "himself". Après avoir connu l'infortune puis vécu de maigres pitances, voici l'acteur érigé au zénith d'Hollywood. Presque une lapalissade. Rocky 2 (Sylvester Stallone, 1979), Rocky 3 - L'oeil du Tigre (Sylvester Stallone, 1982) et Rocky 4 (Sylvester Stallone, 1985) corroborent cette apothéose parfois un peu trop clinquante. En outre, Rocky 3 et Rocky 4 affinent cette inclination pour cette boxe transmuée en spectacle tout en brocardant et en admonestant un sport (le noble art) sous la férule du capitalisme et de la pécune.
Rocky Balboa lui-même sera désarçonné par ces directions spinescentes et se laisse flagorner à son tour par une vie un peu trop pérenne. Il perdra ainsi son opiniâtreté de naguère contre Clubber Lang (Rocky 3), puis son meilleur ami, Apollo Creed face à un vil soviétique, Ivan Drago (Rocky 4), mué en véritable machine de guerre. Après un Rocky 5 (John G. Avildsen, 1990) de sinistre mémoire, Stallone est prié de retourner gentiment dans ses pénates. Mais le comédien, dépité, se doit de revêtir, derechef, les oripeaux guerroyeurs du célèbre boxeur. Ce sera Rocky Balboa (Sylvester Stallone, 2006), un sixième chapitre conçu - à la base - pour signer l'ultime absoute de la franchise.
A vrai dire, personne n'y croit. Qui peut gager sur ce boxeur et donc sur cet acteur presque sexagénaire qui doit s'empoigner avec le champion du monde ?
Pourtant, le film réédite les illustres performances de son glorieux aîné avec une humilité, une loyauté et une affabilité qui font plaisir à voir. Pourtant, pas question de cesser les inimitiés ! Certes, désormais, Stallone est un peu trop chenu pour retourner dare-dare sur le ring. Voilà que les scénaristes exhument sans barguigner le fils d'Apollo Creed. Son prénom ? Adonis. Le jeune homme impétueux aspire à façonner sa légende et sa propre mythologie. Le fiston d'Apollo est-il prédestinéà marcher dans le sillage et le continuum de son auguste patriarche ? Telle est la question qui point en filigrane de Creed : l'héritage de Rocky Balboa (Ryan Coogler, 2015).
Assidu, Stallone répond doctement à l'appel et devient, bon gré mal gré, cet entraîneur avisé et cette figure patriarcale envers un boxeur en manque de reconnaissance.
Si la circonspection est évidemment de mise, Creed étaye et peaufine des thématiques pourtant ressassées et réitérées à maintes reprises dans la saga. Paradoxalement, la recette éculée fonctionne sur la durée avec néanmoins cette impression de vacuité et d'inanité. Si la franchise se poursuit, elle doit se nantir de nouveaux syllogismes sous peine de vaciller, puis de péricliter. De facto, on pouvait se montrer, à minima, dubitatif devant la sortie de Creed 2, réalisé par les soins de Steven Caple Jr. en 2019. Bien conscient d'une certaine redondance de la franchise, Stallone précise que ce huitième chapitre sera, cette fois, son ultime apparition sous les traits chenâtres de Rocky Balboa.
A contrario, les producteurs seraient déjà sous la sellette pour financer un troisième épisode encore putatif. Que ces derniers se rassérènent.
Creed 2 s'achemine peu ou prou sur le même sillon que son précédent homologue et semble épouser la même trajectoire frugifère. De surcroît, les critiques se montrent (presque) unanimement panégyriques via de nombreux plébiscites et satisfécits. Reste à savoir si Creed 2 mérite (ou non) de telles courtisaneries. Réponse à venir dans les lignes de cette chronique... Hormis Sylvester Stallone citéà moult reprises, la distribution du long-métrage se compose de Michael B. Jordan, Dolph Lundgren, Florian Munteanu, Tessa Thompson, Brigitte Nielsen, Phylicia Rashad et Milo Ventimiglia.
Attention, SPOILERS ! (1) Creed s'est taillé une solide réputation sous le mentorat de Rocky Balboa ; le jeune boxeur devient champion du monde dans la catégorie « poids lourds ». Alors que la vie est agréable avec cette victoire et son mariage avec Bianca, l'ambiance s'assombrit à Philadelphie quand Ivan Drago, le boxeur russe qui a tué, sur le ring, le père d'Adonis, Apollo, arrive avec son fils, Viktor, pour défier Adonis.
Ne suivant pas les précieuses instigations de Rocky, Adonis relève le défi sans être épaulé par son mentor et en paie le prix fort dans une joute punitive, qu'il gagne par disqualification. Maintenant blessé et démoralisé, Adonis peine à se remettre à la boxe, laissant son esprit en divagation et son titre en péril. Sa famille et Rocky doivent donc trouver un moyen de relancer l'esprit de combat d'Adonis pour affronter l'avenir quoi qu'il advienne. Pendant ce temps, la famille de Drago a ses propres problèmes et essaie de regagner le respect de la « mère patrie », qu'ils ont perdu au profit de Rocky.
Les Drago se demandent si cela en vaut vraiment la peine (1). Certes, à l'aune de cette exégèse, les thuriféraires de la franchise seront probablement en terrain connu et quasiment conquis. Certes, Steven Caple Jr., nouveau réalisateur en place, a parfaitement cerné et discerné les thématiques prédominantes de la franchise depuis ses tous premiers ânonnements.
A nouveau, le film déclame dogmatiquement les thèmes de l'édification d'un futur champion, sa naissance, sa ténacité, sa vie souvent tumultueuse, ses combats acharnés, mais aussi cette chute impromptue qui voit le sportif peu à peu se décharner. A l'instar de ses précédents affidés, Creed 2 se canalise sur le même fatum mélancolique avec son lot de dramaturgies dont le fan de la saga est désormais coutumier. Tels sont les principaux leitmotivs de ce huitième chapitre, sans doute un peu trop indolent, pour convaincre sur sa durée académique de deux heures et dix minutes de bobine.
Pour s'octroyer la complicité béate du spectateur ingénu, Steven Caple Jr. joue la carte de la nostalgie via le retour inopiné d'Ivan Drago. Le boxeur furibond croit tenir sa revanche à travers les uppercuts et les coups de semonce de son cher fiston.
Une hérésie. Dès lors, Creed 2 convoque à la barre les chapitres 2, 3 et 4 pour les mixer en une sorte de salmigondis filmique, qui louvoie entre cette polarisation sur l'arbre Rocky Balboa, le ressentiment d'Ivan Drago qui a métamorphoséà son tour son fils en une machine impitoyable et invulnérable, et les larmoiements d'un Adonis Creed dont on se contrebalance complètement. Heureusement, dans cette débâcle cinéphilique, Sylvester Stallone et Dolph Lundgren apparaissent comme des figures suffisamment totémiques et tutélaires pour parvenir encore à magnifier une franchise naguère flamboyante. Hélas, l'allégresse est de courte durée et presque instantanément galvaudée par les pleurnichements incessants d'Adonis Creed et d'un film qui tergiverse continûment entre le fan service et de nouvelles historiettes exsangues. Il est même curieux de lire autant de dithyrambes sur ce huitième volet tant la formule paraît désormais surannée ; et tant son personnage principal manque de robustesse et surtout de charisme nonobstant les efforts remarqués (remarquables...) de Michael B. Jordan pour transcender un protagoniste qui manque indubitablement de nitescence.
Certes, les laudateurs originels apprécieront sans doute les subterfuges matois opérés et essaimés, çà et là, par un Steven Caple Jr. particulièrement madré. Cependant, difficile de ne pas tancer et vitupérer une mise en scène beaucoup trop basique et conventionnelle pour sublimer un combat final au dénouement archi prévisible. Cette fois-ci, la messe est dite. Il serait temps, grand temps de cesser les belligérances sous peine de chanceler dans les affres abyssales de la modicité. Et c'est ce qu'a parfaitement compris Sylvester Stallone.
Note : 10/20
Alice In Oliver