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A Certain Kind Of Death (Les morts gouvernent les vivants)

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A_Certain_Kind_of_Death

Genre : Shockumentary, documentaire, trash, death movie (interdit aux - 18 ans)

Année : 2003

Durée : 1h09

 

Synopsis : Un shockumentary troublant et déconcertant qui se polarise sur le processus de conservation, d'identification et d'inhumation de personnes défuntes et qui exhalent leur dernier soupir dans la solitude, privées de toute sphère sociale et de l'absence de toute famille ou de parents proches. 

La critique :

Vous l'avez sans doute compris et même sans doute subodoré. Depuis quelques semaines, voire plusieurs mois, Cinéma Choc s'attelle et conglomère les pellicules underground, trash et extrêmes. Dans toute son impudence, mêlée à son incompétence crasse, le blog se polarise tout particulièrement sur les death movies, les "Mondo" et les shockumentaries déviants. Dans cette litanie de pellicules outrecuidantes, on décèle, çà et là, quelques productions sagaces et clairvoyantes. Récemment encore, le 10 juin 2019 pour être précis, le site se focalisait sur le court-métrage intituléThe Act of Seeing with One's Own Eyes (Stan Brakhage, 1971). Certes, le fameux Faces of Death est souvent considéré comme le death movie prodrome de sa sinistre catégorie, une félonie puisque le film reprend sciemment le syllogisme, déjà morbide, de Mondo Cane (Gualtiero Jacopetti, Franco Prosperi et Max Cavalara, 1962).

De surcroît, les condescendances de The Act of Seeing With One's Own Eyes n'ont pas escarpéà John Alan Schwartz, le célèbre réalisateur démiurgique de Face à la Mort. Cependant, dans son opportunisme et sa complaisance, le metteur en scène n'aspire pas à réitérer les affabulations ésotériques et mortifères du court-métrage de Stan Brakhage et opte pour un "documenteur" vérité. Un oxymore... Pourtant, d'un point de vue historique et cinématographique, c'est bien The Act of Seeing with One's Own Eyes qui apparaît comme le pionnier du death movie et qui remporte la palme de l'indécence.
Pour la première fois à l'écran, un métrage explore les couloirs de la mort, pas ceux de la sentence capitale, mais les coursives étroites de la morgue, soit le lieu idoine pour tout étudiant en médecine qui souhaite se spécialiser dans l'odontologie chirurgicale.

Contrairement àFace à la Mort et sa kyrielle de succédanés, The Act of Seeing With One's Own Eyes (Source : http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2019/06/10/37295602.html) n'a pas pour aspiration à duper et ne revêt donc pas un caractère mensonger. Tous les macchabées présentés et compilés sur des tables mortuaires sont hélas bien réels. L'objectif ? Comprendre ces derniers instants qui précédent l'inhumation. Parfois, pour des raisons techniques, légales et médicales, les corps sont disséqués et anatomisés de la paroi abdominale en passant par les circonvolutions neuronales. Aucun death movie, ou presque, ne rééditera de telles élucubrations à postériori, hormis quelques exceptions notables, entre autres le terrifiant Orozco The Embalmer (Kiyotaka Tsurisaki, 2001, Source : http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2015/04/05/31832351.html) et l'effroyable Der Weg Nach Eden (Robert Adrian Pejo, 1995, Source : http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2016/01/31/33276302.html).

Pénétrer dans une morgue et filmer la besogne de médecins légistes et de thanatopracteurs avisés serait inconcevable aujourd'hui, déjà pour des questions de confidentialité, d'éthique et de déontologie. Sur ce dernier point, A Certain Kind Of Death, réalisé par la diligence de Blue Hadaegh et Grover Babcock en 2003, est probablement le "vrai" dernier death movie sur ce sujet à la fois déroutant et spinescent. Les deux cinéastes restent presque totalement inconnus au bataillon. En tapant le cryptonyme de Blue Hadaegh sur Google, le metteur en scène est aussi affiliéà la réalisation de Scenes of a Crime (2011), un autre documentaire inédit dans nos contrées hexagonales.
Même remarque concernant Grover Babcock. A ce jour, A Certain Kind of Death reste donc leur métrage le plus notable et le plus notoire.

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Auprès des critiques, A Certain Kind Of Death s'attire les plébiscites, les satisfécits et les convoitises, ce qui est plutôt rarissime pour un death movie. Ainsi, le film est reçu sous les vivats et les acclamations des festivals, notamment lors de ses présentations, presque concomitantes, au festival du film de Sundance où il remporte le prix spécial du jury, et lors du festival d'Atlanta où il s'octroie la récompense du meilleur documentaire. Reste à savoir si le métrage mérite (ou non...) de tels dithyrambes et de telles flagorneries. Réponse à venir dans les lignes de cette chronique...
Indubitablement, A certain kind of Death n'est pas un death movie comme les autres, tout du moins un métrage qui baguenaude dans le sillage et le continuum de Faces of Death, Faces of Gore (Todd Tjersland, 1999) et autres Traces of Death (Damon Fox, 1993).

A Certain Kind Of Death joue donc la carte de la véracité et de l'authenticité. Derechef, tous les défunts amoncelés sont donc bien réels, ce qui explique l'ultime réprobation, soit une interdiction aux moins de 18 ans. Mais ne nous égarons pas et revenons à l'exégèse du film. Attention, SPOILERS ! A certain kind of Death est un shockumentary troublant et déconcertant qui se polarise sur le processus de conservation, d'identification et d'inhumation de personnes défuntes et qui exhalent leur dernier soupir dans la solitude, privées de toute sphère sociale et de l'absence d'une quelconque famille ou de parents proches. Pour les laudateurs du cinéma underground et qui s'attendent à un véritable festival de barbaque et de tripailles, merci de quitter prestement leur siège et de retourner gentiment dans leurs pénates ! A Certain Kind Of Death n'a pas vraiment (du tout...) pour aspérité de se centrer sur des victimes d'accidents routiers et sportifs, ni sur des corps écrabouillés par la roue plantureuse d'un char militaire, un peu à la manière de la série des Arquivos Da Morte.

Pour étayer son propos mortuaire, A Certain Kind Of Death repose en grande partie sur les divers témoignages des acteurs qui viennent chercher le cadavre putrescent à son domicile. Ainsi, médecins légistes, fonctionnaires administratifs, thanatopracteurs et policiers sont dépêchés sur place et interviewés sur les suites et les conséquences d'une scène qui devient de facto protocolaire. Il s'agit donc de déterminer la nature et le caractère de la mort : un suicide, un meurtre ou encore un décès naturel. Ensuite, l'enquête diligentée consiste à scruter le passé de la victime, celui qui le lie et l'affilie à une famille et/ou à un entourage quelconque. 
En plus de la mort foudroyante, le cadavre en décomposition témoigne de l'isolement social et affectif de la victime.

Nonobstant tous leurs efforts, certains macchabées restent confinés dans l'anonymat. Le processus d'identification, d'investigation et de notification est le résultat de longues perquisitions. Parfois même, la dépouille n'est presque plus identifiable car le corps inerte est retrouvé ou signalé après plusieurs semaines de désagrégation. Pour Blue Hadaegh et Grover Babcock, l'horreur est intrinsèquement corrélée à cette anonymie, lorsque la personne n'est, in fine, reliée à personne ; exhalant son ultime soupir dans la mélancolie, la solitude et la résipiscence. 
De surcroît, une autre question se pose en filigrane. Quel est le degré de responsabilité de notre société sur ces notions de déréliction, d'esseulement et de décrépitude ? La vision de tous ces corps entassés, et dans l'attente d'une enquête plus exhaustive et poussée, estourbit durablement les persistances rétiniennes ; notamment lorsque le corps d'un vieillard est ramassé après probablement plusieurs jours, voire plusieurs semaines de dégénérescence. 
Pour l'anecdote funèbre, le cadavre est retrouvé dans un appartement vétuste et à l'écart de toute relation et de tout regard social ; ce qui traduit notre égotisme et notre apathie à tous crins devant la mort de l'autre. La vision de ces cadavres abandonnés par leurs paires et la sphère sociétal tarabuste inlassablement, comme si les morts gouvernaient les vivants. Tel est le didactisme méphitique de A Certain Kind of Death, notre présent et surtout notre avenir étant rattrapés par l'histoire, le passé, la tragédie et, in fine, la mélancolie. Indiscutablement, on tient là un death movie perspicace et clairvoyant avec une véritable vision sociologique et clinique de la mort, de cet ultime trépas et de cet instant fatidique qui nous attendent ; en espérant seulement que ce triste fatum ne se déroulera pas dans la claustration et l'anonymité...

Note : 15.5/20

sparklehorse2 Alice In Oliver


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