Genre : Horreur, fantastique, épouvante, gore (interdit aux - 18 ans à Hong-Kong/interdit aux - 16 ans chez nous)
Année : 1982
Durée : 1h32
Synopsis :
Yu Chun et deux de ses fidèles servantes sont en train de prier lorsque surgit un sorcier l'exhortant à se marier avec, ce qu'elle refuse. Il lui jette alors une terrible malédiction. Régulièrement, sa tête se détachera de son corps et se mettra à voler dans les alentours pour attaquer des gens et boire leur sang. Toutes les tentatives d'exorcisme pour lever le sort se révèlent inefficaces, et Yu Chun est forcée de vivre en sachant qu'une fois par mois, sa tête prendra une vie innocente. Des années ont passé, et une nouvelle rencontre avec le sorcier pourrait lui permettre de briser la malédiction une fois pour toute.
La critique :
Et non, vous ne rêvez pas ! Ce cycle de taille très modeste consacré au cinéma HK poursuit sa lancée dans la limite de mes possibilités d'acquisition. En effet, je dois bien avouer avoir surestimé la disponibilité d'une part non négligeable de ces films car même le site ultraspécialisé Wipfilms a plus d'une fois montré ses limites. C'est en alternant ce site et YouTube que je peux vous abreuver de chroniques ayant trait au fameux univers de la Cat III. Enième petite piqûre de rappel, la Cat III est une branche radicale du cinéma d'exploitation hong-kongais où se côtoient allègrement la violence, le barbarisme, la brutalité, la perversion ou encore la décadence. Réunissant des pellicules d'horizons très variés tels que le conte fantastique, le wu xia pian, le film de combats, le serial-killer sadique, cette frange avait pour but de condenser la frustration des hong-kongais désireux de dépasser les limites imposées par une censure étatique absurde. Officiellement, c'est aux célébrissimes Shaw Brothers à qui l'on doit la "Vague pré-Cat III", avant que le terme ne soit officiellement déclaré en 1988 avec Gunmen, le tout premier à s'enorgueillir du cachet maudit qui, je le rappelle, correspond à une interdiction aux moins de 18 ans chez eux et à une interdiction aux moins de 16 ans chez nous. Toutefois, dans le cas de certains métrages, on est en droit de se poser des questions sur le bien-fondé d'une telle interdiction tant leur tonalité ne prête guère à subir cette ultime réprobation.
Pour ne pas changer, on se contentera de rester une fois de plus dans la pré-Cat III avec The Witch With Flying Head, sorti en 1982, tandis que certaines sources attestent une sortie en 1977. Point d'importance : on tient là une production taïwanaise, comme en atteste les écritures sur la pochette. Sans entrer dans de la géopolitique de comptoir, vous n'êtes pas sans savoir que Taïwan et Pékin entretiennent des relations hautement sensibles avec, en toile de fond, les USA derrière cet état insulaire. En sachant que l'emprise du pouvoir chinois sur Taïwan était beaucoup plus forte auparavant, il était alors logique qu'il intègre le même classement que ses frères cantonais.
Derrière cette réalisation, nous retrouvons Jen-Chieh Chang qui a officié en tant que scénariste, acteur et bien sûr réalisateur. Vous ne serez pas surpris que sa filmographie soit inédite dans nos contrées et que The Witch With Flying Head n'a pas encore eu cette chance de se voir offrir une tentative de chronique sur l'Internet français. Une fois de plus, ceux qui nous lisent (soit 10 personnes dans le monde en prenant en compte les chroniqueurs eux-mêmes du site) seront ravis d'être aux places VIP en tant que premiers lecteurs du tout premier billet en français. C'est beau...
ATTENTION SPOILERS : Yu Chun et deux de ses fidèles servantes sont en train de prier lorsque surgit un sorcier l'exhortant à se marier avec, ce qu'elle refuse. Il lui jette alors une terrible malédiction. Régulièrement, sa tête se détachera de son corps, et se mettra à voler dans les alentours pour attaquer des gens et boire leur sang. Toutes les tentatives d'exorcisme pour lever le sort se révèlent inefficaces, et Yu Chun est forcée de vivre en sachant qu'une fois par mois, sa tête prendra une vie innocente. Des années ont passé, et une nouvelle rencontre avec le sorcier pourrait lui permettre de briser la malédiction une fois pour toute.
Après cette alléchante petite photo, il convient de clarifier plusieurs points. Tout d'abord, nous savons que la mythologie de l'Asie du Sud-Est est d'une richesse extrême en ce qui concerne les esprits, les monstres et autres fantômes. On pense facilement aux yokai japonais mais résumer le monstre asiatique au Japon serait de fort mauvais goût car les fameux "dragons asiatiques" partagent aussi un folklore quelque fois bien singulier. Que cela soit la Malaisie, la Thaïlande, le Cambodge, le Laos, le Vietnam ou l'Indonésie, leur folklore est fascinant et à des années-lumière du nôtre. C'est en assistant il y a un peu plus d'un an à l'excellente exposition "Enfers et Fantômes d'Asie" du musée du Quai Branly à Paris que j'ai pu m'évader un temps dans une horreur plus exotique. Ainsi, quelle ne fut pas ma surprise quand je fis la rencontre du film en question mettant en scène le monstre le plus révulsant à mes yeux de l'expo. Vous ne le connaissez pas ? Alors laissez-moi vous présenter le "Krasue", soit un esprit féminin nocturne revêtant l'apparence d'une femme jeune et belle dont les organes internes pendent en-dessous du cou.
Elle est aussi munie de crocs pointus, ce qui lui vaut parfois le nom de "tête-vampire". Comme cette entité n'a pas de partie inférieure du corps, elle se déplace en planant dans les airs au-dessus du sol. Elle est fréquemment accompagnée d'une lueur luminescente à la manière d'un feu follet. Les explications sur son origine seraient en lien avec la présence de méthane dans les zones marécageuses mais les croyances populaires sont tenaces et il est arrivé plus d'une fois que des villageois relient des situations mystérieuses au Krasue.
Vous avez donc la preuve que le Krasue, croyance partagée dont l'origine est difficile àétablir, est reconnu. Alors quand un réalisateur ambitieux décide de s'atteler à un film portant sur cette charmante moitié de femme volante, il est difficile de détourner les yeux. Mais Pré-Cat III oblige, il ne faut pas s'attendre à quoi que ce soit d'intelligent, de profond, de métaphysique ou de dénonciateur. On est en plein dans du cinéma d'exploitation qui ne veut aucunement se prendre au sérieux et qui n'est là que pour délivrer la barbaque. Autant être clair, le scénario bancal, parfois même mal torché ne sera pas ce qui fera tirer le film vers le haut. Les événements sont amenés de manière brutale, versant carrément dans le stéréotype à plusieurs reprises ou se donnant même le culot de rendre le tout confus.
Rien n'excuse The Witch With Flying Head sur ce point. Pire encore, l'édition sous-titrée est à pleurer avec une mauvaise image, un son déformé et des bandes floues dans le bas de l'image. Manque de pot pour les sous-titres qui ne sont pas toujours lisibles. On sait que le cinéma HK n'est pas réputé pour sa conservation mais reste que cette négligence abjecte choque.
Mais alors comment expliquer le fait que je sois incapable de tamponner sauvagement la mention "navet" sur la pochette avec tout le cynisme qui me caractérise ? Eh bien, plusieurs choses ! Tout d'abord, s'il y a bien une seule et unique star, c'est bien le Krasue qui sait se parer d'un rendu saisissant. Yun Chu, frappée par cette malédiction, procure un réel malaise lors de ses incontrôlables transformations. Son regard d'un noir ténébreux, ses entrailles ensanglantées, ses bruits d'outre-tombe ne peuvent laisser indifférent. Secundo, les effets spéciaux surréalistes dans le kitch sont un vrai régal de fous rires entre les lasers, boules de feu, frisbees explosifs et j'en passe et des meilleurs.
Rien que le combat final promet un spectacle dantesque ! Tertio, notre humble cinéaste sait tenir notre attention en éveil et nous gratifier de séquences morbides et, parfois, même gores. Enfin, quoi que l'on en dise, la bande son fait plutôt mouche, quoiqu'un peu trop tonitruante sur les bords. Dommage que les décors soient cependant génériques. Pour les acteurs, ça reste très Cat III en surjouant et en cabotinant à tout bout de champ. Hsiu-Chen Chen, Shang-Chien Liu, Chang Ma, Ling-Tzu Chin, Shu-Chen Li, Mei Hua Chen et Fung Yue que je suis sûr que vous connaissez sont de la partie.
Ainsi s'achève un nouveau chapitre de cette modeste rétrospective consacrée à un courant très peu mis en valeur sur la Toile française qui me donne plaisir à braquer les projecteurs sur lui. On ne peut pas dire que c'est là-dedans que se retrouvent les leçons de cinéma s'entremêlant entre elles. Oui, la Cat III tout comme la pré-Cat III n'ont pas l'objectif primordial de se prendre au sérieux. Elles ne sont juste qu'un produit d'une époque où la violence dans le Septième Art tendait àêtre décomplexée. Vous aurez deviné en deux coups de cuillère à pot que The Witch With Flying Head remplit son cahier de charge en faisant office d'oriflamme du mouvement HK d'exploitation.
Mieux, il assume à 100% sa débilitéà laquelle nous pouvons rajouter la ringardise compte tenu de ce que donnent ces CGI en 2019. Un vrai plaisir coupable ou devrais je dire un nanar de compétition qui mériterait amplement d'avoir une édition un minimum valable, loin de l'épouvantable et éprouvant visionnage du film en VOSTA sur YouTube. Le Krasue vous passe le bonjour de son marécage.
Dans mon humble beauté, je vous offre une magnifique esquisse de cette douce nymphe ensanglantée.
Note : Nanar