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Goodnight Mommy (Nouvel uppercut autrichien)

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good night mommy

Genre : drame, fantastique, thriller (interdit aux - 12 ans)
Année : 2015
Durée : 1h40

Synopsis : En plein été, dans une maison de campagne perdue au milieu des champs de maïs et des bois, des jumeaux de dix ans attendent le retour de leur mère. Lorsqu’elle revient à la maison, le visage entièrement bandé suite à une opération de chirurgie esthétique, les enfants mettent en doute son identité

La critique :

Le cinéma autrichien reste assez méconnu et nébuleux aux yeux du grand public. Il faut donc s'appuyer sur les festivals pour voir les films du pays voisin (et adversaire) de l'Allemagne s'exporter au-delà de ses frontières. Michael Haneke l'a bien compris. Lui qui a triomphé en France et ailleurs avec La Pianiste (2001) et Caché (2005) a connu ses premiers relents de notoriété avec Benny's Video, son deuxième long-métrage. Ce thriller familial préfigurait déjà les prémisses du scénario de Funny Games, un autre thriller qui marquera durablement les esprits lors de sa présentation au festival de Cannes en 1997. La presse et les critiques se montrent (quasi) unanimes.
Le film serait le digne épigone d'Orange Mécanique (Stanley Kubrick, 1974).

Si les deux longs-métrages partagent de nombreuses analogies, ils diffèrent néanmoins sur de nombreux aspects. Funny Games propose une réflexion largement aiguillée par le pouvoir des médias et de l'image, conviant le spectateur à scruter la torture physique et mentale d'une famille suppliciée par deux adolescents transformés en bourreaux. En dépit de sa réputation sulfureuse, le film s'exporte difficilement à l'étranger. Bien conscient de la portée de cet objet filmique non identifié (OFNI), Michael Haneke décide de réaliser un remake américain, justement intituléFunny Games US (2007).
Les thèmes de prédilection du cinéaste ? La violence minorée à travers les réseaux sociaux ou alors son antithèse, lorsqu'elle devient l'égérie des médias. Michael Haneke fustige également l'indifférence de notre société consumériste et hédoniste face à l'horreur ou encore à la guerre. Soit le portrait de communautés en pleine décrépitude, inlassablement poursuivies par les spectres du fascisme et de la barbarie.

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Le cinéma de Michael Haneke, c'est aussi cette analyse d'une société autrichienne et contemporaine cadenassée par cette faillite parentale et surtout par cette conflagration de la cellule familiale. Indubitablement, Funny Games a laissé des cicatrices indélébiles, comme l'atteste la sortie de Goodnight Mommy, un nouveau thriller autrichien réalisé par les soins de Severin Fiala et Veronika Franz en 2015. Si le film n'obtient qu'un succès d'estime en dehors de ses frontières, il récolte, à l'inverse, la ferveur des critiques de cinéma. En France, Goodnight Mommy est présenté lors du festival du film fantastique de Gérardmer, suscitant à nouveau la controverse.
Reste à savoir si le long-métrage est bel et bien l'uppercut annoncé. Réponse dans les lignes à venir.

Inutile de mentionner les acteurs, à moins que vous connaissiez les noms de Susanne West, Elias Schwarz, Lukas Schwarz et Hans Hersher, mais j'en doute. Attention, SPOILERS ! En plein été, dans une maison de campagne perdue au milieu des champs de maïs et des bois, des jumeaux de dix ans attendent le retour de leur mère. Lorsqu’elle revient à la maison, le visage entièrement bandé suite à une opération de chirurgie esthétique, les enfants mettent en doute son identité.
Peu à peu, l'étau se resserre. Les deux jumeaux s'en prennent à leur propre mère qu'ils suspectent d'être une étrangère. En outre, difficile de répertorier Goodnight Mommy dans une catégorie précise. Le long-métrage est à la fois un thriller, un drame familial, un huis clos, un film fantastique et d'épouvante.

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Par certains aspects, Goodnight Mommy n'est pas sans rappeler les thématiques eschatologiques de Le Village des Damnés (Wolf Rilla, 1960). A la seule différence que les gosses ne semblent pas provenir d'une lointaine contrée (ou menace...) extraterrestre. Les deux jeunes jumeaux sont bien humains, tout du moins, en apparence... En l'occurrence, la notion de temps semble avoir été volontairement oblitérée par les deux réalisateurs. En revanche, la notion d'espace, se transformant rapidement en huis clos anxiogène, tient une place prépondérante. De facto, Severin Fiala et Veronika Franz s'attardent longuement sur le décor ambiant. A fortiori, le cadre est plutôt champêtre et bucolique.
Les deux cinéastes filment d'immenses étendues vertes et châtoyantes situées au beau milieu de nulle part. 

A cette nature primordiale, se juxtapose une autre réalité cette fois-ci beaucoup plus morbide. Le retour inopiné de la mère vient donc contrarier le quotidien de deux frères. L'opération esthétique qui l'a défiguré, laissant apparaître un visage presque entièrement bandé et tuméfié, n'est qu'un leurre et un simulacre, pour mieux farder l'arrivée du "Mal", celui qui taraude les deux bambins psychopathes.
Narquois, Severin Fiala et Veronika Franz éludent toute explication rationnelle sur cette sociopathie naissante. Toutefois, cette aliénation semble intrinsèquement reliée à cette nature substancielle et à cet instinct archaïque, celui qui dicte nos pulsions archaïques et notre sens de l'intuition. De surcroît, la figure patriarcale est la grande absente de ce long-métrage, comme si cette dernière avait, depuis longtemps, été chassée de ses pénates.

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Condamnée à jouer la figure hégémonique et autoritaire, la marâtre se heurte à une insubordination juvénile et indocile. On se croirait presque dans un conte des frères Grimm à la tonalité putrescente. A l'instar de Michael Haneke avec Funny Games (déjà précité), Severin Fiala et Veronika Franz jouent la carte de la suggestion. Mutins, les deux réalisateurs jouent avec les nerfs du spectateur.
A défaut d'innover, Fiala et Franz réinventent et s'approprient les codes du cinéma d'épouvante autrichien, en nimbant leur pellicule de thématiques philosophiques, psychologiques et familiales. Parfois envoûtant, souvent déconcertant, Goodnight Mommy justifie bel et bien son visionnage, sans néanmoins, réitérer la performance du même Funny Games. Toutefois, avec de tels longs-métrages, le cinéma fantastique autrichien a de beaux jours devant lui.

Note : 14.5/20

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