Genre : Thriller (interdit aux -16 ans)
Année : 1979
Durée : 1h24
Synopsis :
Trois jeunes voyous entrent dans un train de nuit et s’y font rapidement remarquer. La gêne n’est dans un premier temps qu’auditive mais bien vite, les passagers se voient injuriés et bousculés. L’un des trois malfrats, plus entreprenant que les autres, parvient à séduire l’une des femmes du train mais ce qui s’annonçait comme une relation sexuelle consentie vire finalement au viol collectif. Devant l’immobilisme des autres voyageurs, les voyous n’hésitent pas à passer à la vitesse supérieure, multipliant alors les exigences sexuelles et les actes de violence.
La critique :
Le cinéma italien ou le summum du raffinement pour de nombreux cinéphiles qui ont très vite su marquer non seulement le paysage cinématographique italien mais aussi le cinéma mondial. Ai je besoin de mentionner Fellini, Visconti, Rossellini ou encore Antonioni pour ne citer que ceux-là ? Néanmoins, on a souvent tendance à oublier la face cachée du cinéma italien, un visage bien plus sombre et nihiliste des histoires d'amours romancées. Je veux bien sûr parler du giallo qui a pu s'imposer chez les grands amateurs du genre et qui a même su se distinguer aux yeux du grand public.
Ce genre typiquement italien à la frontière entre le policier, l'horreur et l'érotisme a connu son heure de gloire durant les années 60 à 80 et se caractérisait avant tout par de grandes scènes de meurtres sanglantes, un jeu de caméra très stylisé et une tonalité théâtrale.
Ce courant, bien mis en valeur par des réalisateurs que l'on ne présente plus sur le blog tels Lucio Fulci, Dario Argento ou encore Mario Bava, a réussi à accoucher de nombreuses pellicules de qualité et apportant une touche de fraîcheur, d'identité et d'originalitéà un cinéma d'horreur souvent fort conventionnel. Bien évidemment, cela a un revers et le giallo se montre ainsi plus difficile d'accès qu'il n'en a l'air. Il me faudra d'ailleurs plusieurs essais avant de savoir aborder correctement les films de ce type. Que soit, l'heure est venue de présenter un giallo très confidentiel, excessivement méconnu et dont on ne trouve que peu d'informations, j'ai nomméTerreur Express réalisé par Ferdinando Baldi. Un réalisateur qui s'est surtout fait connaître grâce aux western spaghetti. Reste à voir si la prise de risque fut payante.
ATTENTION SPOILERS : Trois voyous fous furieux s'introduisent dans un wagon-lit. Ils vont terroriser les passagers, qui ne valent guère mieux qu'eux : de l'épouse adultère et nymphomane à une prostituée employé des chemins de fer, en passant par un vieil homme lubrique, un père de famille pédophile et déviant avec sa maîtresse, un repris de justice et son gardien, un policier vulgaire et violent. Commence alors une longue nuit de cauchemars, faites de viols, d'humiliations et de meurtres sanglants.
Synopsis plutôt alléchant pour un film au potentiel certain dans sa possibilité d'analyser et décortiquer les rapports sociaux. Qu'en est il ? Pour être honnête, la déception fut grande. La faute peut-être au fait que j'en attendais trop ? Difficile à dire mais on ne peut cacher que Terreur Express souffre de défauts forts gênants alors que tout démarrait sur les chapeaux de roue. Ainsi, le film, dans son intensité, peut se distinguer en 2 parties d'une durée relativement similaire.
Dès le départ, on accroche quasi instantanément avec un récit qui nous met d'emblée de jeu dans l'action sur les quais d'embarquement où nos 3 lascars se montreront insupportables avec une jeune femme au téléphone. Pas de chance pour elle et pour les voyageurs ayant eu la bonne idée d'aller en Allemagne cette nuit-ci, ces 3 lascars seront du voyage et n'hésiteront pas très vite à se faire remarquer. A ce niveau, le cinéaste sait planter de manière efficace son décor en mettant en place une atmosphère oppressante et anxiogène saupoudrée d'un climat de malaise retranscrit de manière très réaliste.
Mieux encore, Baldiélude tout manichéisme dans les rapports victimes/tortionnaires car ceux-ci se montreront tout autant mauvais et malsains que les 3 voyous. Bref, il n'y a aucun gentil et tous sont à mettre dans le même sac. Une analyse sociale se met en place en dénoncant la face cachée de personnes en apparence normale avec d'un côté un policier antipathique, un père aux pulsions pédophiles envers sa propre fille ou encore un mari trompeur et un financier aimant descendre psychologiquement son secrétaire. Difficile d'éprouver de la sympathie pour tous ces personnages méprisants et trompeurs et c'est un point positif qu'il faut souligner car cela renforcera l'austérité de ce long-métrage étouffant le spectateur et le mettant mal à l'aise dans ce train de la dépravation.
Il sera d'ailleurs amusant de constater que leur salut proviendra de personnes qu'ils se sont fait un plaisir d'ostraciser et qui afficheront nettement plus de courage et de compassion. Dans son analyse, Baldi fait mouche et dénonce l'hypocrisie d'une société plus malade que les individus qu'elle considère comme malades.
L'ambiance devient rapidement oppressante, les malfrats commencent à s'agiter de plus en plus dans des événements qui s'enchaînent bien tout en bouleversant le spectateur devant l'immoralité du récit. Oh joie d'avoir face à soi un thriller étouffant ! Mais pour, on ne sait quelle raison, Baldi perd de vue toute la qualité et l'intensité de l'oeuvre. Dans sa deuxième partie, Terreur Express va alors se transmuter en prise d'otage à wagon ouvert où les malfrats s'amuseront tantôt à jouer aux dés avec les prisonniers mâles ou tantôt avoir l'un ou l'autre rapport sexuel.
Des rapports sexuels étonamment peu censurés (cunnilingus, anulingus et léchage de tétons très peu suggérés voire montrés de manière quasi frontale) qui sont omniprésents et ponctuent à de nombreuses reprises le métrage au point de noyer le spectateur dedans. A force d'accumuler les viols, Baldi se perd dans une production devenue quelque peu racoleuse et faisant de Terreur Express, une oeuvre qui tourne très vite en rond.
Certes, on sera malmené par des viols assez terrifiants entre cette jeune femme prise en sandwich par 2 des 3 hommes ou encore du mari forçant son épouse, auparavant violée, à avoir des rapports sexuels avec lui car il veut se montrer aussi bon au lit qu'eux. Le summum étant le père faisant enfiler la chemise de nuit de sa fille à l'escort-girl pour avoir des rapports sexuels avec par la suite. Une séquence frôlant l'intolérable. Néanmoins, on tique devant certaines réactions incompréhensibles et cela se vérifiera avec deux des prisonnières qui accepteront spontanément et même avec entrain d'avoir des rapports avec les tortionnaires. Je veux bien que le syndrome de Stockholm est une réelle pathologie mais parvenir à trouver 2 énergumènes dans un même train, ça fait beaucoup.
De même, on aurait franchement pu se passer d'une histoire d'amour naissante alors que l'escort-girl venait de voir passer tous les phallus des voyous sur elle. Bonjour la crédibilité par moment. Au final, on sera balloté durant la dernière moitié du film à arpenter les wagons et à suivre un petit viol par-ci, une petite humiliation par là avec l'inévitable qui s'ensuit, la dégradation de la redoutable intensité de la première partie.
L'ambiance pesante devient rapidement redondante et le cadre du semi huit-clos malsain finit par s'évaporer lentement mais sûrement, avec quelques soubresauts, parfois stratosphériques, comme j'ai pu le dire au-dessus. Autant dire qu'on en vient àêtre désappointé et ce n'est pas la plastique du film qui aurait pu descendre le film car celle-ci est agréable. Les décors très succincts sont à la fois bien filmés et toujours de manière fort serrée pour étouffer le spectateur. L'image est plutôt belle et la mélodie fréquente est plus que belle. On n'oubliera pas de parler de la prestation des bourreaux pour le coup de grande qualité car ils se montrent très bien investis dans leur rôle, au détriment des autres acteurs nettement plus monolithiques. Exception faite pour Silvia Dionisio, d'une beauté purement italienne et confirmant le vieil adage que les plus belles femmes du monde sont italiennes. Ca reste subjectif, je précise.
En conclusion, il est indéniable que Terreur Express possède de solides arguments pour convaincre entre une analyse sociale froide d'une humanité laide et sale dans ses rapports avec les autres ainsi que d'une jeunesse perdue et semblant être oubliée de ses aînés. Les gentils n'étant pas toujours ceux que l'on croit. A cela, on peut rajouter un climat claustrophobe et glauque au sein d'un huit-clos semblant évoluer en dehors du temps, une prestation de bonne facture des sadiques de service, de vraies séquences chocs et une plastique travaillée. Ceci dit, si la première partie était d'excellente qualité et aurait pu propulser Terreur Express dans la case des grands thrillers injustement oubliés, la deuxième dégrade considérablement la chose en tournant en rond et en accumulant des rapports érotiques qui font parfois plus office de remplissage qu'autre chose.
C'est d'ailleurs bien là les seules scènes de violence physique car aucune goutte de sang ne sera versée, même durant le meurtre de nos 3 joyeux compères. On pourrait faire une belle allégorie de la mise en scène de Terreur Express en la comparant à un pic rocheux. D'abord, très haut et puis après très bas. C'est bien là le seul défaut récurrent du film ainsi que certaines incohérences due à une prise d'otage qui n'en est pas vraiment une par moment. Se déplacer librement pour certains dans les compartiments, bof bof pour une prise d'otage digne de ce nom.
Mais bon, on ne peut s'empêcher de trouver ce giallo méconnu sympathique. A recommander uniquement aux passionnés du genre. Les autres pourront passer leur chemin.
Note :11/20