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Memento ("Remember Sammy Jenkins")

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Genre : thriller, policier, inclassable
Année : 2000
Durée : 1h56

Synopsis : Leonard Shelby ne porte que des costumes de grands couturiers et ne se déplace qu'au volant de sa Jaguar. En revanche, il habite dans des motels miteux et règle ses notes avec d'épaisses liasses de billets. Leonard n'a qu'une idée en tête : traquer l'homme qui a violé et assassiné sa femme afin de se venger. Sa recherche du meurtrier est rendue plus difficile par le fait qu'il souffre d'une forme rare et incurable d'amnésie. Bien qu'il puisse se souvenir de détails de son passé, il est incapable de savoir ce qu'il a fait dans le quart d'heure précédent, où il se trouve, où il va et pourquoi. Pour ne jamais perdre son objectif de vue, il a structuré sa vie à l'aide de fiches, de notes, de photos, de tatouages sur le corps. C'est ce qui l'aide à garder contact avec sa mission, à retenir les informations et à garder une trace, une notion de l'espace et du temps. 

La critique :

Avant devenir le réalisateur de la trilogie sur le super-héros de Gotham (Batman Begins, The Dark Knight et The Dark Knight Rises), Christopher Nolan débute sa carrière cinématographique en 1998 avec Following, un polar qui rencontre un succès d'estime, notamment auprès des critiques et de la presse cinéma. Pour son second long-métrage, Memento, sorti en 2000, Christopher Nolan dispose donc d'un budget un peu plus onéreux.
Le metteur en scène n'a jamais caché son admiration pour les univers épars et contemplatifs de Terrence Malick, Fritz Lang, Terry Gilliam et de Stanley Kubrick. Pour Memento, Christopher Nolan souhaite griffonner, avec la collaboration et l'érudition de son frère, Jonathan Nolan, un scénario imprévisible et non-linéaire dont le personnage central serait prisonnier.

Telle est la genèse de MementoD'ailleurs, le film est aussi l'adaptation d'une nouvelle éponyme de Jonathan Nolan, très inspiré pour l'occasion. Les deux frangins se coalisent pour transposer l'opuscule sur grand écran. Si Memento ne parvient pas vraiment à s'imposer dans les salles obscures, il séduit à l'inverse les festivals et remporte de nombreux prix, notamment le Saturn Award du meilleur thriller au festival de Sundance, le MTV movie award du meilleur nouveau cinéaste pour Christopher Nolan, ou encore le prix Edgar Allan Poe du meilleur film.
Autant de récompenses qui hissent Memento dans le haut du panier. 
Reste à savoir si cette pellicule mérite un tel panégyrisme. Réponse dans les lignes à venir... En l'état, Memento n'est pas forcément le long-métrage que l'on citerait en premier dans la filmographie déjà exhaustive de Christopher Nolan.

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Et pour cause... Puisque Memento appartient à la catégorie de ces films indépendants qui parviennent néanmoins à s'illustrer via l'intermédiaire de la vidéo ou du streaming. Au fil des années, Memento s'est donc taillé une solide réputation sur la Toile, annonçant déjà la virtuosité d'un très grand cinéaste, celui d'Inception (2010) et d'Interstellar (2014). La distribution de Memento réunit Guy Pearce, Carrie-Anne Moss, Joe Pantoliano, Mark Boone Junior, Jorja Fox et Stephen Tobolowsky.
Attention, SPOILERS ! Leonard Shelby ne porte que des costumes de grands couturiers et ne se déplace qu'au volant de sa Jaguar. En revanche, il habite dans des motels miteux et règle ses notes avec d'épaisses liasses de billets. Leonard n'a qu'une idée en tête : traquer l'homme qui a violé et assassiné sa femme afin de se venger.

Sa recherche du meurtrier est rendue plus difficile par le fait qu'il souffre d'une forme rare et incurable d'amnésie. Bien qu'il puisse se souvenir de détails de son passé, il est incapable de savoir ce qu'il a fait dans le quart d'heure précédent, où il se trouve, où il va et pourquoi. Pour ne jamais perdre son objectif de vue, il a structuré sa vie à l'aide de fiches, de notes, de photos, de tatouages sur le corps. C'est ce qui l'aide à garder contact avec sa mission, à retenir les informations et à garder une trace, une notion de l'espace et du temps. Autant l'annoncer de suite.
Memento est un thriller ou plutôt une sorte de puzzle épars, difficile - voire impossible - à narrer et à appréhender. 
Par sa volonté farouche de briser toute logique linéaire de narration, Christopher Nolan cherche à désarçonner le spectateur ébaubi via un scénario totalement alambiqué. 

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C'est aussi l'atout majeur de MementoEn cassant perpétuellement le sens de la narration, Nolan nous convie en pleine autoscopie mentale et plus particulièrement dans la mémoire en déliquescence de Leonard Shelby (Guy Pearce). Suite à une agression, l'ancien assureur souffre de troubles mnésiques qui touchent la mémoire antérograde ou la mémoire immédiate. En résumé, Leonard Shelby se souvient avec précision de tous les événements antérieurs de sa vie jusqu'au meurtre de sa femme.
Ses troubles mnésiques concernent donc "l'après" et se manifestent toutes les quinze minutes, se caractérisant par un néant total. De facto, pour mener une enquête pour le moins nébuleuse et en proie à sa propre subjectivité, Leonard Shelby prend des photos, répertorie les indices, se tatoue le corps de différentes pistes qui, croit-il, vont le mener vers le criminel.

Christopher Nolan opacifie son propos en brouillant davantage les pistes et la narration en proposant un scénario uchronique, c'est-à-dire à la fois chronologique et anté-chronologique. Impression renforcée par des passages en noir et blanc qui constituent des maillons essentiels de l'enquête. A moins qu'ils ne soient que des simulacres. De surcroît, les saynètes en couleurs relatent la trame scénaristique principale. Pourquoi je suis là ? Qu'est-ce que je fais ici ? Où suis-je ?
Autant de questions qui tarabustent le héros principal au fil du récit. Ainsi, les séquences incohérentes s'enchaînent, perdant à la fois Leonard et le spectateur dans une sorte d'imbroglio scénaristique, mais qui prend tout son sens lors de la conclusion finale. En outre, difficile de sonder et d'analyser un film tel que Memento, tant ce thriller - définitivement inclassable et à la limite de l'expérimental - déroute.

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Toutefois, on retrouve dans ce thriller abscons les thèmes récurrents de Christopher Nolan, à savoir le temps qui passe et qui conditionne notre mémoire comme la preuve de notre existence. Telle est la rhétorique de Memento. "Remember Sammy Jenkins". Tel est l'avertissement emphatique par ailleurs tatoué sous le bras de Leonard Shelby. A travers Memento, Christopher Nolan nous convie à réflexionner sur la notion de vérité. Mais qu'est-ce que la vérité ?
Les propos à priori mensongers d'un certain Teddy ? Ou encore les sournoiseries de Natalie, une trentenaire factieuse et vaniteuse ? D'ailleurs, au fil du récit, Leonard Shelby construit sa propre vérité, donc celle qui l'arrange avec certaines révélations qu'il ne peut accepter. De facto, le héros poursuit probablement un fantôme ou un criminel qu'il a déjà exécuté sans en esquisser le moindre souvenir.

Ce qui interroge évidemment sur sa quête effrénée ou sur le sens même de sa vengeance et plus largement de son existence, derechef articulée autour d'une mémoire éparse et défaillante. Pour survivre et se construire un simulacre d'existence, Leonard Shelby façonne ses journées et régule une enquête qu'il croit diligenter. Une chimère. Pour exister, l'ex-assureur est bien obligé de se fier au regard et au jugement des autres, sans qui il ne peut avancer. 
Memento interroge et interpelle aussi sur le concept identitaire. A travers son enquête, Leonard Shelby cherche avant tout des réponses sur lui-même et à se façonner une identité. Sa plus grande peur ? Se transmuter en un clone de Sammy Jenkins qui souffre des mêmes symptômes et réduit à l'état de cacochyme.

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Or, cet aspect identitaire se forge et s'érige au contact et en fonction des assertions d'autrui. De facto, l'identité de Shelby se délite ou se construit en fonction d'impressions forcément subjectives. Vous l'avez donc compris. Chaque spectateur aura sa propre interprétation de Memento. Certains esprits, beaucoup plus perplexes et dubitatifs, pourront y voir une oeuvre factice, dont l'originalité repose uniquement sur cette déconstruction narrative permanente.
Dès ce second film, Nolan affirme et affine déjà toute sa virtuosité derrière la caméra. Ne soyons pas dupe. Memento reste sans aucun doute l'un des thrillers les plus sous-estimés des années 2000. Avec un tel métrage amphigourique et labyrinthique, Christopher Nolan réalise, à notre avis, son meilleur film, juste après Interstellar.

Note : 17/20

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