Genre : thriller (interdit aux - 12 ans)
Année : 1983
Durée : 1h42
Synopsis : L'écrivain Gerard, bisexuel, tombe sous le charme de Catherine, une femme fatale qui tue ses amants après leur avoir fait l'amour
La critique :
Difficile de parler d’un film aussi complexe que Le Quatrième homme de Paul Verhoeven, qui est l’avant-dernier film du réalisateur de RoboCop en Hollande avant son départ aux Etats-Unis (suivra La Chair et le sang). Le Quatrième homme aborde de nombreuses thématiques, la plupart tournant autour des fantasmes sexuels chez un homme mûr (magnifiquement joué par Jeroen Krabbé, que vous avez probablement vu en méchant dans Tuer n’est pas jouer), sujet récurrent chez Verhoeven (référence Basic instinct). Le Quatrième homme est donc, à n’en point douter, un film particulier et assez unique, qui partage les cinéphiles depuis plus de 30 ans.
Quoiqu’il en soit, il est indéniable que Le Quatrième homme a laissé une trace indélébile dans l’histoire du cinéma mondial et reste à ce jour l’un des meilleurs films jamais réalisés sur le sujet.
Personnellement, il a d’ailleurs rejoint mes films préférés et est aussi, avec Turkish delices et La Chair et le sang, l’un des meilleurs films de son cinéaste ! Avec Le Quatrième homme, Paul Verhoeven signe un film pour le moins dérangeant puisqu’il nous plonge dans les désirs les plus intimes d’un homme qui va tomber sous le charme d’une femme fatale et manipulatrice, Catherine, qui évoque à bien des égards la Catherine Tramell de Basic instinct, puisque comme Sharon Stone dans le film de 1992 ; Catherine tue aussi tous ses amants après avoir fait l’amour avec eux.
Le héros du film (un écrivain) va donc se retrouver pris au piège... Particulièrement cru dans sa démarche, le film de Verhoeven est aussi l’un des plus violents du cinéaste hollandais, et qui a le mérite d’avoir un démarrage sur les chapeaux de roues.
Ainsi, le long-métrage commence par une scène où Krabbé, nu, tue son amant violonniste. Par la suite, le film s’articule autour des cauchemars prémonitoires et abominables de l’écrivain. Inversant la domination de l’homme sur la femme, Le Quatrième homme peut aussi se voir comme une peinture au vitriol des mœurs de toute une époque. Bisexualité et homosexualité, tout y passe dans une forme de trip psychédélique écrasant, où chaque acteur livre une inoubliable prestation de chair et de sang (surtout de chair). Mention spéciale à Krabbé qui se donne à fond dans ce délire ultraviolent et proche de l’abstraction. Assumant complètement ses références, Le Quatrième Homme s’inspire volontiers des films de Brian De Palma (Dressed to kill et Sisters sont abondamment cités) pour montrer l’acte sexuel par analogie avec un acte de violence.
A cette virulence, viennent également s'agréger des scènes de meurtres particulièrement graphiques. On y retrouve aussi certains passages purement gore qui déconcerteront beaucoup de spectateurs à n’en pas douter (castration et énucléation, entre autres). Vous l’aurez compris, Le Quatrième homme est un film dont on ne ressort pas indemne. Pas étonnant donc, pour le scandale provoqué par le film. Effectivement, il ne sortira d’ailleurs en France qu’en 1992 (en même temps que Basic instinct !) et ce malgré un prix à Avoriaz, qui aimait bien récompenser ce genre de film à l’époque (Le Quatrième homme en 1983, Blue velvet en 1986, The Fly en 1987, je crois).
Le Quatrième Homme est aussi un film qui bouscule le spectateur et l’amène à réfléchir sur la position de voyeur dans laquelle il est placé, notamment lorsque le héros se retrouve face à un homme attachéà une croix et simplement habillé d’un slip rouge.
Le héros, voyant cet homme au visage impassible et sans défense, y voit immédiatement l’opportunité de l’abuser en regardant ses organes génitaux. FIN DES SPOILERS. Que penser d’une scène pareille ? À mon sens, la question de Verhoeven n’est pas à ce moment : « Que feriez-vous dans cette situation ? », mais plutôt : « Que penser du personnage après cette scène ? ». Qui est le voyeur ? Le voyeur est-il celui qui regarde l’homme nu accrochéà la croix ou bien l'inverse ?
Autant d'interrogations qui incitent le spectateur à réflexion sur sa propre condition de voyeur. En l'état, difficile de rester insensible devant une cette saynète à la tension sexuelle évidente. En conclusion, Le Quatrième homme est un film très important qui choque et bouleverse. Une expérience cinématographique pas forcément agréable mais nécessaire.
Note : 20/20