Genre : drame
Année : 1995
Durée : 1h39
Synopsis : Ex-membre des marines, Louanne Johnson accepte d'enseigner à la East Palo Alto Highschool, un établissement à la réputation sulfureuse. Réalisant que ses élèves possèdent de grandes capacités intellectuelles, elle décide de se battre pour les aider à apprendre.
La critique :
En vérité, il faudrait sans doute remonter aux années 1930 pour trouver les tous premières prémices de la violence scolaire au cinéma à travers une comédie française truculente et goguenarde, Zéro de Conduite (Jean Vigo, 1933). Certes, à l'époque, le film sort en plein apogée du nazisme, annonçant plusieurs années de purgatoire pour l'industrie cinématographique, mais Zéro de Conduite préfigure avant tout la fin de l'autorité parentale et du Patriarcat trois décennies avant la révolution culturelle, sociale et sexuelle des années 1960. C'est donc avec beaucoup de hâblerie que ce long-métrage, joliment désuet, arbore des élèves dissidents et admonestant leurs professeurs.
Pis, ces derniers participent allègrement aux inimitiés et se regimbent à leur tour contre l'institution scolaire.
Vingt ans plus tard, c'est au tour de Graine de Violence (Richard Brooks, 1955) de s'inquiéter de ces premiers mouvements de dissentiment juvénile. Si la Seconde Guerre mondiale est terminée depuis longtemps, la Guerre Froide et l'avènement du Rideau de Fer entre la Russie et les Etats-Unis sonnent le tocsin d'une jeunesse en désuétude et en insurrection contre les dogmes parentaux. Dans les décennies qui suivront, de nombreuses productions aborderont ces thématiques spinescentes en se polarisant sur la faillite de l'institution scolaire.
Qu'ils se nomment La Journée de la Jupe (Jean-Paul Lilienfeld, 2008), Elephant (Gus Van Sant, 2003), Ecrire pour exister (Paul LaGravenese, 2007), 1987 : Code Meurtre (Kevin Reynolds, 1997), The Substitute (Robert Mandell, 1996), Class 1984 (Mark L. Lester, 1982), ou encore Le Proviseur (Christopher Cain, 1987), toutes ces pellicules traiteront, avec plus ou moins de componction, cette dichotomie entre le corps professorat et des élèves en pleine insubordination.
Vient également s'agréger Esprits Rebelles, Dangerous Minds de son titre original, et réalisé par les soins de John N. Smith en 1995. Pour certains adulateurs, Esprits Rebelles appartient à la catégorie de ces drames générationnels. Par ailleurs, le long-métrage se soldera par un succès phénoménal lors de sortie en salle. Mieux, Esprits Rebelles s'octroie plusieurs récompenses, entre autres le prix de la meilleure actrice pour Michelle Pfeiffer et le prix de la meilleure chanson pour un long-métrage pour Gangsta's Paradise. Si le morceau est chanté par Coolio et ses subordonnés, Gangsta's paradise est, en réalité, une reprise éponyme d'un titre de Stevie Wonder.
Au niveau de sa bande originale, Esprits Rebelles possède d'autres artistes ou groupes proéminents dans sa besace, notamment Bob Dylan (Mr. Tambourine Man et Let Me Die in my footsteps), The Jackson Five (I want you back), ou encore Otis Redding (Respect).
Pour l'anecdote, le comédien Andy Garcia devait initialement participer au tournage de Dangerous Minds, mais l'acteur vaque déjàà d'autres occupations et essuie poliment l'invitation. En raison de son succès pharaonique, Esprits Rebelles se transmutera à posteriori en une série télévisée homonyme. Au fil des années, le métrage s'est même arrogé le statut de film culte. Reste à savoir si cette production harangueuse mérite de telles flagorneries. Réponse à venir dans les lignes de cette chronique... Dangerous Minds est aussi l'adaptation "d'une autobiographie, My Posse Don't Do Homework, d'une ancienne US marine, Johnson Louanne, cette dernière fut engagée en tant qu'enseignante à l'école secondaire Carlmont en Californie en 1989" (Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Esprits_rebelles).
Hormis Michelle Pfeiffer (précédemment mentionnée), la distribution de ce drame scolaire se compose de George Dzundza, Courtney B. Vance, Robin Bartlett, Beatrince Winde, John Neville, Wade Dominguez, Lorraine Toussaint et Renoly Santiago.
Attention, SPOILERS ! (1) Ancienne US marine, Louanne Johnson, postule pour un emploi d'enseignante à l'école secondaire dans Carlmont en Californie. Elle est surprise et heureuse de se voir offrir le poste, avec effet immédiat. Elle commence à enseigner dès le lendemain et se trouve confrontée à une classe d'adolescents difficiles, tous issus du milieu populaire, et de minorités ethniques de la ville. La plupart sont impliqués dans la guerre des gangs et des drogues.
Elle se bat chaque jour pour que ses protégés reprennent confiance en eux et progressent : c'est le seul moyen de sauver leur vie (1). Certes, Esprits Rebelles jouit d'une solide réputation sur la Toile, surtout auprès de toute une armada de thuriféraires qui décèlent, dans ce film, un message profond, puissant et porteur d'espoir pour toute une jeunesse issue de la plèbe et condamnée à reproduire le même schéma social, celui de la résipiscence et de l'impécuniosité.
Pourtant, même si nos chers élèves rebellocrates se montrent dubitatifs à l'égard d'un système qu'ils bafouent et admonestent, l'Oncle Sam ne les pas phagocytés, loin de là. En particulier Louanne Johnson (Michelle Pfeiffer), une nouveau professeur de français qui écope d'une classe de cancres notoires. A fortiori, rien ni personne n'a pu résister à cette troupe de mécréants qui fustigent et collectionnent les professeurs subsidiaires. Mais pas Louanne Johnson. Tout d'abord convaincue qu'elle va pouvoir leur enseigner les proses de Ronsard et les verbiages lettrés de Marcel Proust, la trentenaire ingénue déchante pourtant rapidement. Dès lors, John N. Smith ne nous refuse aucune excentricité et accumule les archétypes avec une jubilation à peine dissimulée.
Tout d'abord vêtue comme une sorte d'avocate haranguant sa classe, Louanne Johnson redouble d'effort et se transmue subrepticement en une jeune rebelle, arborant des frusques dilacérées, et même des santiags qu'elle appose sur son bureau de classe.
Mieux, l'enseignante dénote chez ses élèves analphabètes une intelligence hors du commun. Contre toute attente, ces geeks, ces trafiquants de drogue, ces bambocheurs et ces fomentateurs, dénués de tout rudiment d'orthographe et de grammaire, se révèlent être des poètes et des romantiques habilement camouflés. Après leur avoir expliqué quelques techniques de self-défense et de karaté, Louanne devient leur meilleure alliée et leur enseigne des textes griffonnés par Bob Dylan lui-même. Alors que nos cancres se planquaient dans les couloirs du lycée pour dealer ou se colleter, les voici dare-dare en train de consulter les manuels littéraires de la bibliothèque... On croit fabuler !
Hélas, les longues moralines de la "professeur Michelle Pfeiffer" ne s'arrêtent pas là... En dehors de ses heures de cours et de travail, la comédienne se métamorphose en assistante sociale de luxe et vient congratuler ses élèves à leur domicile et devant des parents étrangement incongrus.
Bientôt, ces visites inopportunes se transmutent en invitation au restaurant, et même en assemblée générale dans les parcs d'attractions ! Ou Hollywood, quand tu nous tiens... Vous l'avez donc compris. En voulant marteler un message sur cette école qui serait synonyme d'ascension sociale, Esprits Rebelles dissémine un discours au mieux indigent. On préférera se gausser de la crédulité de ce genre de production qui, derechef, ne nous épargne aucun poncif habituel ; entre le latino dealer de crack et le black danseur émérite de hip-hop ! Déjà, à l'époque, Esprits Rebelles semblait en total décalage avec une réalité hélas beaucoup plus séditieuse.
Aujourd'hui, il fait figure, au mieux, de petit nanar inconséquent qui se sauve in extremis du naufrage abyssal grâce à la pugnacité de son actrice principale, donc Michelle Pfeiffer (au cas où vous n'auriez toujours pas compris...). C'est bien la seule à y croire...
Côte :Nanar
Alice In Oliver
(1) Synopsis du film sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Esprits_rebelles