Quantcast
Channel: Cinéma Choc
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2562

The Killing Of America (La fin et la mort du rêve américain)

$
0
0

killing of America

Genre : shockumentary, trash, documentaire, "Mondo", historique, "documenteur" (interdit aux - 18 ans)
Année : 1982
Durée : 1h35

Synopsis : Le déclin des Etats-Unis à travers des séquences d'une violence inouïe, des extraits rarissimes, des images d'archives et les interviews concomitantes de divers témoins, de policiers et même de tueurs en série tristement notoires. 

La critique :

Suite du cycle consacré aux "Mondo" et aux shockumentaries sur Cinéma Choc. Comme vous avez pu le constater, le blog se polarise, depuis quelques temps, sur certains chocs viscéraux, brutaux et donc interdits aux moins de 18 ans. Depuis la sortie de Mondo Cane (Franco Prosperi, Gualtiero Jacopetti et Paolo Cavara, 1962), le film prodrome du genre "Mondo", le shockumentary s'est largement démocratisé via le support vidéo, en scrutant et en revisitant les us et les coutumes de différentes peuplades à travers le monde. La primauté reviendra, de prime abord, au continent africain avec sa litanie d'abjections et d'images révulsives, dont Africa Addio (Franco Prosperi et Gualtiero Jacopetti, 1966), Addio Ultimo Uomo (Alfredo et Angelo Castiglioni, 1978) et Africa Ama (Alfredo et Angelo Castiglioni, 1971) sont les dignes figures tutélaires. Vers la fin des années 1970, le "Mondo" et le shockumentary connaissent un autre tournant rédhibitoire en lutinant et en s'acoquinant avec le death movie.

Le long-métrage charnière se nomme Faces of Death (John Alan Schwartz, 1978), ou Face à la Mort en français. Cette fois-ci, le long-métrage propose une rétrospective sadique et mortuaire en se focalisant sur des morts à fortiori bien réelles. C'est même son principal argumentaire : "Quand la mort n'est pas du cinéma...". A raison, les thuriféraires du cinéma trash et underground exultent et croient détenir le nouveau parangon du cinéma trash. Banni, honni et vouéà l'opprobre et aux gémonies, Faces of Death détient toujours le record d'animadversion à travers le monde et récolte aussi l'ultime réprobation, soit une interdiction aux moins de 18 ans.
Pourtant, la plupart des saynètes putrides et morbides sont factices et en réalité tournées par des acteurs amateurs, parfois par John Alan Schwartz lui-même. 

images (1)

Néanmoins, la duperie matoise fonctionne puisque le public extatique et scopophile se précipite pour s'octroyer Faces of DeathSi le film ne bénéficie évidemment pas d'une sortie dans les salles de cinéma, il caracole en tête de vente via le support vidéo. Succès mirobolant oblige, le long-métrage se décline en une franchise mercantiliste, lucrative et interminable. Mieux, Faces of Death devient un épiphénomène et engendre de nombreux épigones. Les laudateurs du cinéma trash et underground n'omettront pas de stipuler des oeuvres telles que Faces of Gore (Todd Tjersland, 1999), Traces of Death (Damon Fox, 1993), Banned From Television (Joe Francis, 1998), Death Scenes (Nick Bougas, 1989), ou encore Inhumanities 2 - Modern Atrocities (Wesley Emerson, 1989) parmi les pires impudicités du "Mondo", du shockumentary et du death movie, ici coalisés pour satisfaire notre propre appétence pour l'âcreté et la violence.

Vient également s'agréger un autre candidat... et un concurrent robuste par ailleurs... J'ai nomméThe Killing Of America, réalisé par les soins de Leonard Schrader et Sheldon Renan en 1982. En outre, Leonard Schrader a surtout officié en tant que scénariste derrière des productions adventices. A la rigueur, sa participation au tournage et surtout à l'écriture du film, Le Baiser de la Femme Araignée (Hector Babenco, 1985), reste sans doute son travail le plus notable et éventuellement notoire. Quant à Sheldon Renan, nous n'avons trouvé aucune information relative, voire même élusive, sur ce cinéaste subalterne, même en nous référant au site IMDb.
A priori, The Killing of America reste sa seule et unique réalisation. Si The Killing of America reste assez largement méconnu dans nos contrées hexagonales, le film s'est octroyé une solide réputation sur la Toile et les réseaux sociaux.

images

Surtout, ce shockumentary s'est durablement installé dans la culture populaire américaine. A l'instar de Faces of Death en son temps, The Killing of America a estourbi les persistances rétiniennes et reste ce fameux Saint Graal recherché, prisé et adoubé par une populace américaine en dissidence et/ou en réédition contre les exactions menées par son propre gouvernement. Tel est, par ailleurs, la principale argutie assénée par The Killing of America. Attention, SPOILERS ! A travers les interviews de shérifs et de policiers (Ed Dorris et Thomas Noguchi), de tueurs en séries tristement notoires (Ed Kemper et Sirhan Sirhan), d'extraits rarissimes et d'assassinats politiques (entre autres, celui de John et de Robert Fitzgerald Kennedy), The Killing of America se polarise sur ces diverses rhétoriques politiques et idéologiques pour étayer et affiner sa thèse du déclin de l'empire américain.

Vous l'avez donc compris. Le shockumentary réalisé par Leonard Schrader et Sheldon Renan, possède de solides arguties dans sa besace. Ici, point de "documenteur" dans la grande tradition du "Mondo" et du death movie pour ulcérer le spectateur déjà transi d'horreur. C'est d'ailleurs le préambule du film. En résumé, toutes les images et les extraits scandés sont bien réels. Pas de publicité mensongère ni de falsification outrancière. Indubitablement, The Killing of America n'a pas vraiment (du tout...) pour velléité d'itérer les mêmes boniments que Faces of Death et sa panoplie de succédanés. Mieux, The Killing of America n'est pas un death movie, mais derechef un shockumentary dans la pure tradition et la pure obédience du terme. Pour faire valoir son didactisme politique, ainsi que sa doxa dominante (à savoir une nation exsangue), The Killing of America s'appuie sur un diaporama historique.

téléchargement (1)

Si le film élude sciemment les premières exhalaisons de la Guerre Froide, Leonard Schrader et son fidèle prosélyte situent les premiers balbutiements de cette déréliction américaine via l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy par Lee Harvey Hoswald. Déjàà l'époque, le métrage se veut être l'un des tous premiers pionniers des thèses conspirationnistes. En résumé, nos gouvernements capitalistes et fallacieux ourdiraient en secret de savants complots. La vérité est sans cesse falsifiée par les médias et les journaux, une théorie toujours d'actualité, encore plus avec Internet, la Toile et les réseaux sociaux. Or, dans le cas du meurtre de J.F. Kennedy, The Killing of America soutient la thèse d'un second complice. Même remarque pour d'autres assassinats politiques.
Clairement, ce documentaire trash ne badine pas avec les images chocs et politiques avec toujours cette scansion peu ou prou analogique : l'Amérique est dissoute, amorphe et désormais moribonde.

Et plus qu'une Amérique atone et apathique, c'est aussi le rêve américain qui s'envole, s'écroule, vacille et périclite. Inexorablement. Impression corroborée par tous ces serial killers américains qui pullulent et sévissent, participant à leur façon, à l'édification de cette fantasmagorie populaire. Ainsi, Ted Bundy, Charles Manson et Ed Kemper deviennent les nouvelles égéries d'un système qui les rabroue autant qu'il les divinise. C'est finalement cet oxymore entre une haine farouche qui consiste à exécuter ces vils tortionnaires et cette promotion quasi publicitaire qui adoube et érige ces cannibales des temps modernes comme des figures hiératiques et plébiscitées par la presse à scandale. 
Certes, aux yeux des adeptes des théories conspirationnistes, la démonstration prodiguée par The Killing of America pourra paraître édifiante, voire exemplaire ; ce qui explique partiellement son interdiction aux moins de 18 ans.

téléchargement

A contrario, ce shockumentary n'est pas exempt de tout reproche et s'apparente, par certaines accointances, à un documentaire inique et propagandiste. Si ce shockumentary soulève avec aisance les tares et les déficiences du déclin d'une culture américaine, le théorème aurait sans doute mérité un bien meilleur étayage, surtout au niveau de son analyse politique et sociologique, beaucoup trop succincte. Par exemple, la guerre froide et ses corolaires sont à peine évoqués. De surcroît, Leonard Schrader et Sheldon Renan ne pipent pas le moindre mot sur l'essence et la genèse d'une nation, à savoir un système démocratique ou républicain (selon les présidents et les gouvernements) fractionné en plusieurs états disparates, chaque état ayant sa propre culture séculaire.
In fine, la violence arborée par The Killing of America paraît bien futile à l'aune d'une actualité encore plus âpre et véhémente et désormais malmenée par les turpitudes du terrorisme. Une autre guerre en somme. Paradoxalement, nonobstant certaines carences lacunaires, The Killing of America permet de revisiter la culture américaine sur plusieurs décennies, les années 1960 et 1970 principalement. Il reste sans doute l'un des "Mondo" les plus pertinents et les plus perspicaces autant par ce qu'il montre, autant par ce qu'il dénonce. En bref, voici un "Mondo" qui appelle à davantage de finauderie et d'introspection, une sagacitéà laquelle le genre est peu coutumier... Et rien que pour cela, The Killing of America mérite bien quelques bonnes grâces de circonstance et congratulations de circonstance.

Note : 14/20

sparklehorse2 Alice In Oliver


Viewing all articles
Browse latest Browse all 2562

Trending Articles