Genre : documentaire, Mondo (interdit aux - 18 ans)
Année : 1998
Durée : 1h34
Synopsis : Violences carcérales, insurrection de détentionnaires, matons courroucés et brutaux, trafics de stupéfiants... Banned From Television - Prison Files revient sur les dossiers et les images brûlantes que vous ne verrez jamais au journal de 20 heures, ou dans un documentaire, ou encore dans une émission.
La critique :
N'ayez crainte. A travers cette chronique, nous ne procéderons pas à l'exégèse du "Mondo", un genre impudent et souvent viscéral, qui acte officiellement sa naissance vers l'orée des années 1960 via Mondo Cane (Gualtiero Jacopetti, Franco Prospero et Paolo Cavara, 1962). Le scénario du film est aussi simplissime que laconique et consiste à une revue, voire à un panorama des us et des coutumes, pour le moins insolites, des différentes peuplades à travers le monde. Tantôt truculents, tantôt virulents, tantôt condescendants, ces rituels exposent sans fard toute l'âpreté, la cuistrerie et l'avidité de notre Humanité en désuétude. Toujours la même antienne...
Nous vivons dans un monde profondément archaïque nonobstant notre simulacre de consumérisme et de modernité.
Nous vivons dans un monde de chien. Tel est, par ailleurs, l'intitulé (dans sa version transalpine) du long-métrage. Evidemment, une oeuvre aussi scandaleuse ne manquera pas d'estourbir durablement les persistances rétiniennes lors de sa présentation au festival de Cannes. Mondo Cane influence et génère alors de nombreux épigones. Quinze plus tard, John Alan Schwartz fait preuve d'opportunisme et transmute le concept de Mondo Cane en un shockumentary déviant et à consonance mortifère. Son nom ? Faces of Death (1978), une oeuvre trash qui devient le nouvel objet à admonester et à rabrouer pour une censure sévèrement courroucée.
Cette fois-ci, la mort, dans toute sa cupidité et sa brusquerie, n'est pas simulée ni occultée. La mort est bien réelle.
Tout du moins, tel semble être le principal leitmotiv arboré par l'affiche du film : "Quand la mort n'est pas du cinéma...". Or, à l'instar de Mondo Cane et de la quasi intégralité des "Mondo", les ignominies perpétrées sont factices et interprétées par des comédiens anonymes. Toutefois, le subterfuge matois fonctionne et prolifère. Faces of Death détient encore à ce jour le record d'animadversions à travers le monde et se transmue en une franchise lucrative. A son tour, le film de John Alan Schwartz engendre toute une floraison de succédanés. Les thuriféraires de ce registre cinématographique n'omettront pas de stipuler des oeuvres telles que Acts of Violence (Imre Horvath, 1985), Gang Violence (Flatline Productions, 2006), Shock of the Century (Flatline Productions, 2006), la saga Death File amorcée par les soins de Yôhei Fukuda en 2006, ou encore The Many Taboos of Death (1995).
En résumé, le "Mondo" reste intrinsèquement relié au shockumentary et a encore de beaux jours devant lui, surtout avec l'essor et la proéminence des réseaux sociaux ; ces derniers érigeant les théories du boniment et du conspirationnisme contre les roueries d'un capitalisme financier et mondialisé. Mais c'est encore un autre sujet... Dans cette litanie d'oeuvres ordurières et aux exhalaisons souvent nauséabondes, vient également s'agréger Banned From Television - Prison Files, réalisé par les soins de Joe Francis en 1998. Pour la faribole futile, ce "Mondo" est le quatrième chapitre d'une pentalogie. Ce quatrième méfait est précédé par Banned From Television, Banned from Television 2, Banned From Television 3 et suivi par un inévitable (hélas...) Banned From Television : Prison Files 2.
Ne cherchez pas. Tous ces documentaires (documenteurs...) sont sortis la même année, donc en 1998, et toujours sous l'aval de Joe Francis.
Visiblement, le cinéaste (vraiment un terme à guillemeter et à minorer) a parfaitement discerné et subodoré les succès concomitants du "Mondo" et du shockumentary. En l'occurrence, la recette famélique repose toujours sur la même ritournelle. Pas besoin de vrais acteurs ou alors de comédiens amateurs, ni d'un budget dispendieux. Il suffit de se rendre sur la Toile et de collecter impunément toutes les images et tous les extraits virulents disséminés çà et là sur les réseaux sociaux. Regroupez le tout et vous obtenez Banned From Television : Prison Files.
Naguère, Cinéma Choc avait déjà chroniquéBanned From Television (Source : http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2017/06/14/35368614.html), un ixième "Mondo" qui pouvait au moins s'enhardir d'empiler toute une pléthore de saynètes chocs, rutilantes et cette fois-ci bien réelles.
Ce "Mondo" proposait de revisiter toutes les images et toutes les séquences coupées et censurées au montage, soit celles que vous ne verrez jamais à la télévision en raison de leur violence exacerbée. Pour ce quatrième avatar, Banned from Television - Prison Files se polarise, comme son intitulé l'indique, sur l'univers carcéral, celui à la fois des matons, des détentionnaires et donc d'une violence devenue ordinaire. Via ses trois précédents homologues, la franchise Banned from Television nous avait habituéà davantage de condescendance, de virulence et d'impertinence : meurtre dans un commerce anonyme, prise d'otages qui dérive vers la barbarie et l'exécution gratuite d'une victime innocente, un flic percuté par un chauffard, des accidents de la route tonitruants et une corrida sanguinolente qui dérive prestement vers la mort atroce de l'animal...
Bien conscient du potentiel fallacieux de sa franchise mercantiliste, Joe Francis décide de poursuivre les exactions triviales en proposant un "Mondo" carcéral. Autant l'annoncer sans fard. D'emblée, l'idée n'est pas forcément aussi funambulesque qu'elle en a l'air. L'idée de scruter, de sonder et visiter cet univers (presque) concentrationnaire, avec pour apanage de montrer et de dénoncer une violence ostentatoire, est plutôt perspicace... Tout du moins, sur la forme... Seul bémol et pas des moindres, à l'aune de notre société moderne et sécuritaire, la presse et les médias sont régulièrement obnubilés par ce sujet insécure. Désormais, on ne compte même plus les émissions et les chaînes d'information qui diffusent à satiété les rixes et les dérives carcérales et/ou sécuritaires.
On se souvient encore des tortures et des abominations perpétrées dans la prison de Guantanamo.
Dans tous les cas, cette même insécurité et cette incapacitéà juguler les pulsions psychopathiques témoignent aussi de la fébrilité de nos sociétés érigées sur les principes démocratiques et de la République. Quelle sanction appliquée à des captifs et à des maniaques diagnostiqués comme anosognosiques et donc irrécupérables ? Telle est la question qui point en filigrane de Banned From Television - Prison Files... Et curieusement, cette introspection est sciemment éludée au profit d'un documentaire abscons, finalement pas beaucoup plus véhément que n'importe quel reportage sur le monde carcéral. On s'attendait à une diatribe au vitriol de cette systémique pénitentionnaire et donc à des saynètes d'une violence inouïe.
En outre, l'interdiction aux moins de 18 ans est totalement usurpée. Cette ultime réprobation ne prévaut que par la simple apparition de son intitulé majeur : "Banned from Television". Certes, Banned From Television - Prison Files se segmente en plusieurs parties bien distinctes, entre autres la violence parfois gratuite des garde-chiourmes, l'insurrection des détenus, des prises d'otages ou encore le suicide, lui aussi promptement évincé... Mais, hormis un prisonnier précipitéà plusieurs dizaines de mètres et des captifs dévêtus puis forcés à ramper sur un sol noirâtre et immonde, pas grand-chose à signaler... En l'occurrence, difficile de ne pas qualifier ce Banned from Television - Prison Files de duperie et de navet patenté.
Côte :Navet
Alice In Oliver