Réalisation : Karen Arthur
US, 102 min
Scénario : Don Chastain, d'après la pièce de Éric Westphal, Toi et les Nuages
Production : Diana Young
Musique : Roger Kellaway
Photographie : John Bailey
Montage : Carol Littleton
Direction artistique : Conrad E. Angone
Date : 1978
Avec Lee Grant, Carol Kane, Will Geer
Karen Arthur est née le 24 août 1941 à Omaha, Nebraska, USA sous le nom de Karen Jensen. Elle est une réalisatrice et actrice, connue pourLegacy (1975), Cagney et Lacey(1981) et Max la menace (1965).
Carol Kane (née le 18 juin 1952) est une actrice et comédienne américaine. Elle s'est fait connaître dans les années 1970 et 1980 dans des films tels que Hester Street, pour lequel elle a reçu une nomination aux Oscars pour la meilleure actrice, Annie Hall et The Princess Bride… Lee Grant ( ée le 31 octobre 1925) actrice célèbre notamment dans la série télévisée Peyton Place (1964), pour laquelle elle a remporté un Emmy Award en tant que Stella Chernak, elle a ensuite remporté son premier Oscar pour Shampoo (1975), recevant également des nominations aux Oscars pour Le propriétaire(1970) et Le voyage des damnés(1976), puis passa à la réalisation de nombreux documentaires.
Synopsis :
Ellen et Cissy, deux soeurs, vivent ensemble dans une ambiance isolée et étouffante d'une grande maison meublée d'objets africains. La présence du père ne cesse de hanter les soeurs et plus particulièrement la très imaginative Cissy. Ellen est astronome solaire. Elle est partagée entre l'affection portée à sa soeur et l'amour pour David. Cissy dessine et se passionne pour les orang-outang. Nul ne pourra empêcher la folie et la terreur dans cette maison.
En préambule, laissons Karen ARTHUR, nous expliquer les raisons du choix du film : « En 1971, je découvris la pièce française de Eric Westphal « Toi et tes nuages » et fus complètement captivée par la relation étrange de deux soeurs vivant une existence interdépendante et hermétique dans l’ombre de leur père décédé. Pour un metteur en scène, c’était un sujet extraordinaire qui n’attendait que de prendre toute sa dimension sur un grand écran. La pièce confrontait les dualités de la vie, sujet qui me passionnait. «The Mafu Cage» confronte le classique et le primitif, le contemporain et l’originel, le soleil et les nuages, l’animal et l’homme, la relation entre femmes et entre homme et femme.
En analysant les relations des deux soeurs, j’ai cherché la motivation psychologique qui avait pu rendre cette situation particulière très réelle. Je me suis rendue compte qu’elles étaient irrémédiablement enfermées dans une « folie à deux ». Leur dépression finale révélait leur moi profond, les facettes cachées de leurs personnages, autre sujet de fascination pour moi. Le sujet était irrésistible.
La critique :
Reprenons l’histoire, Cissy (Kane) et Ellen (Grant) sont les filles d'un primatologue africain décédé, qui gardait des animaux sauvages dans une cage dans son salon. Mentalement déséquilibrée, Cissy est totalement fascinée par son singe, Mafu, installé dans une cage au milieu d'un amas d'objets africains. Au cours d'une crise de folie, elle tue l'animal, puis exige de sa soeur un autre singe, lui faisant un chantage au suicide.
Au coeur de cette villa remplie de plantes tropicales et d'étranges artefacts africains, résonne une musique africaine obsédante.
Ellen veille continuellement sur sa soeur, la garde auprès d'elle et, bien que frappée d'horreur, remplace chaque fois l'animal assassiné par un autre, qui subira le même sort. La fluidité de la caméra confère un pouvoir envoûtant sur chacune des images, démontrant la maladie mentale de Cissy. A noter l'intérieur d'une maison tribale qui semble être une jungle impénétrable tant elle surprend son spectateur. La cage constituée de trois parois peintes en blanc et une grille aux barreaux épais constituent les lieux centraux : la chambre de torture avec des chaînes scellées à la paroi du fond, où Cissy sacrifie ces singes fétiches représentant très certainement le père et psychanalytiquement parlant, la peur du sexe mâle.
Ellen et Cissy s'aiment d’un étrange amour quasi incestueux. Pour Cissy, l'homme ne peut être que l'intrus. Et lorsqu’Ellen, sexuellement frustrée, devient, pour se libérer, la maîtresse de son collègue David à l'observatoire, elle déclenche le processus irréversible de la destruction d'un "mafu" humain. La dérangée Cissy emprisonne David dans la cage de Mafu et le soumet à une série de rituels horribles et mortels ! Ce n’est pourtant que les balbutiements d’une lente descente dans une folie dévastatrice.
Oeuvre oubliée, pépite inédite aux forts accents oedipiens évitant le côté bis racoleur, The mafu cage apparaît comme un film malade au sens noble du terme, un film d’auteur(e) qu’il faut impérativement découvrir ; tout est parfaitement maîtrisé tant techniquement que par le jeu subtil des actrices. Les accointances avec Max mon amour d'Oshima, Incidents de parcours de Romero, King-Kong pourraient émerger, mais le film de Karen Arthur s’oriente savamment dans la psyché complexe des deux sœurs. En cela, il en diffère totalement. Les années 70 furent propices à de telles créations bravant l’interdit. Jamais ô grand jamais, le cinéma dans ses thématiques obscures ne put germer de nouveau au 21e siècle. Oui nous vîmes des monstruosités filmiques mais sans réelle psychologie, tout dans ce siècle actuel n’est que provocations gratuites, l’image pour l’image, les pires infamies nous sont assénées sans réelle portée philosophique voire psychanalytique.
Film culte, quasi inconnue dans notre contrée, il est temps de donner une chance à ce film, vous trouverez les liens du film sur le blog ciné bis art (merci de leur travail exemplaire) en vostfr !
Note : 15/20
CLINT MATTEI
cinéma bis, tel qu'il s'en exhume sporadiqueme