Genre : inclassable (interdit aux – 16 ans)
Année : 2003
Durée : 1 heure
L'histoire : En Russie, un tueur sombre et impitoyable fait un carnage dans un bar. En rentrant chez lui, il est pris d'hallucinations morbides et d'un mal de crâne insupportable. La seule solution qu'il trouve pour se débarrasser de cette douleur, est de s'enfoncer des clous dans la tête. Mais suite à cela, sa perception de l'environnement qui l'entoure est modifiée.
La critique :
Si vous suivez régulièrement l'actualité du blog Cinéma Choc, vous devez forcément connaître le nom d'Andrey Iskanov, un réalisateur russe, à qui l'on doit le terrible Philosophy Of A Knife (2008), souvent décrié comme le ou l'un des films les plus barbares et violents jamais réalisé. Si depuis, le long-métrage a été dépassé par d'autres pellicules encore plus extrêmes, Philosophy Of A Knife n'en demeure pas moins une production nihiliste et d'une rare brutalité.
Depuis la sortie de cet uppercut cinématographique, Andrey Iskanov a presque disparu des radars. En même temps, le cinéma d'Iskanov ne s'adresse pas vraiment à un large public. En outre, son univers s'inscrit davantage dans un cinéma expérimental, comme l'atteste la sortie de Nails en 2003, soit son tout premier long-métrage.
A l'instar des autres films réalisés par Andrey Iskanov (entre autres, Visions Of Suffering en 2006), Nails n'a pas bénéficié d'une sortie en vidéo ou en dvd zone 2, encore moins (et vous vous en doutez) dans les salles obscures. Toutefois, pour les amateurs de streaming et d'objets filmiques non identifiés (OFNI), le film est disponible sur certains sites compétents. Inutile alors de préciser que le métrage ne réunit pas vraiment des acteurs très populaires, à moins que vous connaissiez les noms d'Alexander Shevchenko, Irina Nikitina, Andrey Iskanov, Alexandra Batrumova et Victor Silkin, mais j'en doute.
Pour le reste, l'intérêt de Nails ne repose pas vraiment sur scénario, assez lapidaire, il faut bien le reconnaître. Attention, SPOILERS !
(1) Un tueur à gage travaillant pour le gouvernement russe rentre chez lui après une mission. Seulement depuis quelques jours, il a de terribles migraines, de plus en plus fortes. Devant ces attaques, il ne trouve qu’un remède, s’inspirant d’un fait divers : s’enfoncer des clous dans la tête. Très rapidement, cela va changer sa perception des choses (1) et de son environnement.
A travers ce tout premier long-métrage, Andrey Iskanov montre déjà sa fascination et son érudition pour le cinéma de David Lynch, notamment pour Eraserhead (1980), mais aussi pour l'univers de David Cronenberg. Par certains aspects, Nails n'est pas sans évoquer des oeuvres comme Scanners (1981) et Chromosome 3 (1979). A l'instar de ses devanciers, Andrey Iskanov se centre sur le délitement physique et mental d'un tueur à gage.
En l'occurrence, difficile de ne pas songer à un autre film surréaliste et expérimental. Son nom ? Tetsuo, réalisé par Shynia Tsukamoto en 1988. Nails, c'est avant tout la juxtaposition de plusieurs univers hétéroclites et polymorphiques. Le long-métrage d'Andrey Iskanov se veut donc ésotérique, brut de décoffrage et n'a pas vraiment pour vocation de flagorner le grand public.
De surcroît, hormis quelques conversations laconiques et sibyllines, Nails fait presque figure de film muet. En outre, le long-métrage est surtout martelé par une bande sonore stridulante et cacophonique, renforçant cette impression de confinement et de psychasthénie mentale. C'est sans aucun doute la thématique principale de Nails, à savoir ce long alanguissement psychique qui va conduire le principal protagoniste à s'enfoncer des clous dans le crâne, à cause de céphalées persistantes.
C'est sûrement pour cette raison qu'Andrey Iskanov opère une dichotomie entre certaines séquences érubescentes et d'autres saynètes réalisées en noir et blanc. Ici, la couleur ou plutôt l'absence de couleurs tient une place prépondérante. En l'occurrence, le cinéaste soviétique nous invite à sonder la psyché en déliquescence de son criminel. Ainsi certaines images furtives et élusives scrutent carrément la cervelle en déréliction du héros principal.
L'organe en putréfaction semble traverser par des flux rougeoyants. Tel est le diagnostic, par ailleurs, d'un médicastre devant les radiographies d'un cerveau clouté et martelé de façon frénétique. Dès lors, Andrey Iskanov s'acharne à filmer et à analyser le quotidien famélique de son personnage en décrépitude.
Hélas, en dépit de ses qualités esthétiques indubitables, Nails doit aussi composer avec un budget famélique, ce qui se ressent parfois sur sa courte durée (à peine une heure de bobine). Enfin, certaines séquences de martèlement et de tortures mentales ne sont pas toujours perspicaces, confinant parfois à l'amateurisme et/ou à un long exercice chirurgical. En l'état, Andrey Iskanov ne délivre pas vraiment de message, d'où la sensation (parfois) de visionner une pellicule vide et absconse.
Ce n'est donc pas Nails qui va venir contrarier et détrôner d'autres productions inclassables et expérimentales. En résumé, Andrey Iskanov ne parvient pas à atteindre la quintessence d'un David Lynch ou d'un Shinya Tsukamoto. Mais ne soyons pas trop sévères et n'oublions pas qu'il s'agit d'un premier film. Un premier essai encourageant, à défaut de marquer durablement nos persistances rétiniennes. Par la suite, Andrey Iskanov déploiera son univers, comme l'atteste (encore une fois) Philosophy Of A Knife.
Note :12.5/20
(1) Synopsis du film sur : http://rickjacquet.over-blog.com/article-critique-nails-77264995.html
Seconde critique :
Pas facile d'aborder un tel OFNI comme Nails. Le cinéma russe reste un cinéma très peu connu en occident. Cependant, ces derniers temps, un réalisateur du nom d'Andrey Iskanov a fait parler de lui sur la toile. Ses réalisations complètement barrées ont heurté les cinéphiles, notamment le terrible Philosophy of a Knife, souvent cité comme le film le plus violent jamais réaliséà ce jour.
Mais en fait, Iskanov a fait ses débuts avec Nails, en 2003, un film qui annonce déjàà quoi va ressembler l'œuvre du réalisateur russe, à savoir un cinéma expérimental, sombre, gore, glauque au montage ultraviolent. Attention, SPOILERS ! L'histoire de Nails est presque inexistante. On suit l'histoire d'un tueur pris de maux de têtes violents et qui tente de les résoudre en se plantant des clous dans le crâne.
Parfois, par sa tonalité et son scénario, Nails rappelle Eraserhead de David Lynch ou encore Tetsuo De Shinya Tsukamoto. En fait, le premier quart d'heure est en noir et blanc, puis, à partir du moment où le personnage principal s'enfonce les clous dans son crâne, le film devient en couleur, marquant ainsi le changement de la perception de l'environnement par l'individu.
A partir de là, la suite ne sera qu'une succession de scènes déjantées et d'images hallucinatoires. Le tout sur une esthétique vraiment étrange et décalée. Le film est certes déboussolant mais aussi gore sur certaines séquences. La scène d'ouverture entre autres, mais également le final dans lequel on voit le personnage se vider le cerveau (au sens propre du terme), ou encore une énucléation montrée en gros plan.
Comme à son habitude, Iskanov ne fait pas dans la dentelle. La réalisation en rebutera plus d'un, entre les images hallucinogènes et les filtres aux couleurs sales, de même que le découpage violent du film. Même si vous ne voyez pas le générique, vous savez d'entrée que c'est un film d'Andrey Iskanov. Le réalisateur fait aussi des apparitions dans quelques petits rôles. Le personnage principal est interprété par Alexander Shevchenko, qui est aussi le créateur de la bande son du film (une expérience étrange pour les oreilles au passage) et qui deviendra par la suite le compositeur de tous les films d'Iskanov.
Comme dans les autres œuvres du cinéaste russe, la musique a un rôle important et contribue largement au côté expérimental de Nails. Tous nos sens sont mis à l'épreuve et on comprend qu'Iskanov nous fait vivre l'expérience de son personnage et nous place dans sa tête en nous faisant partager ses délires, ses hallucinations et sa perception de l'environnement.
La première partie en noir et blanc semble évoquer le monde réel, le passage à la couleur apparaît alors comme une étape franchie par le personnage qui se retrouve dans un monde nouveau, celui de l'inconscient. Nous sommes donc bien dans du cinéma expérimental et clairement, ça ne plaira à tout le monde, beaucoup seront rebutés par la tonalité du film. Au final, on ne sait pas vraiment de quoi Iskanov a voulu nous parler avec ce film. Peut-être que Nails a pour seul but de procurer au spectateur une expérience unique et on pourrait alors dire qu'il réussit son pari.
Cependant, on regrettera peut-être certains effets visuels ou une réalisation un peu à l'arrache sur certaines séquences (en même temps, le budget est loin d'être énorme). Au final, c'est un vrai défi d'évaluer un film OFNI comme Nails, au même titre que les autres œuvres du réalisateur russe, on reste tiraillé entre fascination et perplexité.
Note :?