Genre : fantastique, heroic fantasy, aventure
Année : 1958
Durée : 1h28
Synopsis : Le magicien Sokurah rétrécit la princesse Parisa, fiancée de Sinbad, et pousse ce dernier à retourner sur l'île de Colossa. C'est ici que Sinbad avait libéré Sokurah des griffes d'un cyclope qui avait néanmoins gardé la lampe magique. Afin de retrouver sa précieuse lampe, Sokurah a donc joué ce mauvais tour à Sinbad. Le seul remède qui puisse rendre à Parisa sa taille normale se trouve sur cette fameuse île. Pour Sinbad et quelques autres marins, c'est le début d'un long périple...
La critique :
Nathan Juran fait partie de ces nobles artisans du cinéma bis dont la carrière filmique débute dès les prémisses des années 1940 avec The Loves of Edgar Allan Poe (1942). Mais, pour le réalisateur érudit, il faudra patienter jusqu'en 1951 pour s'enorgueillir d'un premier succès, avec Le Château de la Terreur. Puis, peu à peu, Nathan Juran se spécialise essentiellement dans les registres de la science-fiction, de l'aventure, du fantastique et de l'heroic fantasy.
On lui doit notamment La Légende de L'Epée Magique (1953), La Chose surgit des Ténèbres (1957), A des millions de kilomètres de la Terre (1957), L'Attaque de la Femme de 50 Pieds (1958), Jack le tueur de géants (1962), ou encore Les premiers hommes dans la Lune (1964).
Vient également s'ajouter Le 7e Voyage de Sinbad, sorti en 1958, et qui reste sans nul doute son oeuvre la plus proverbiale. Après Hercule et Ulysse qui ont connu leur quart d'heure de gloire au cinéma, c'est un autre héros, cette fois-ci oriental, qui se distingue de ses devanciers. Contrairement à Hercule et ses nombreux épigones, Sinbad n'est pas spécialement musculeux, véloce ni invulnérable. En outre, le jeune héros audacieux doit faire appel à sa vaillance et à sa ruse pour triompher d'ennemis à priori bien plus trapus que lui. En l'occurrence, Le 7e Voyage de Sinbad se solde par un succès triomphal dans les salles obscures et inspire une inévitable trilogie.
Le film de Nathan Juran sera suivi par Le Voyage Fantastique de Sinbad (Gordon Hessler, 1974) et Sinbad et l'oeil du tigre (Sam Wanamacker, 1977).
Quatre ans plus tard, donc en 1962, Le 7e Voyage de Sinbad engendre un nouvel avatar avec Jack le tueur de géants qui réunit par ailleurs le même cinéaste et le même acteur principal, un certain Kerwin Matthews. Viennent également s'ajouter Kathryn Grant, Richard Eyer, Torin Thatcher, Alec Mango et Danny Green. De surcroît, le long-métrage remporte le Prix Hugo en 1959 qui récompense l'immense travail accompli par Ray Harryhausen derrière les effets spéciaux du film.
Passé maître dans la technique de la stop-motion, le célèbre concepteur turbinera aussi sur les animations de nombreuses créatures aux complexions gargantuesques : Le Monstre des Temps Perdus (1953), Monsieur Joe (1949), Jason et les Argonautes (1963) et Le Choc des Titans (1981), entre autres.
A priori, le synopsis de Le 7e Voyage de Sinbad est de facture basique et conventionnelle. Attention, SPOILERS ! (1) Sur la route maritime qui le ramène à Bagdad en compagnie de sa fiancée, la princesse Parisa, Sinbad fait escale sur l'île de Colossa. Il en profite pour tirer Sokurah, un magicien, des griffes d'un énorme cyclope, qui parvient néanmoins à dérober au sorcier sa lampe magique. Pour contraindre Sinbad à retourner sur l'île de Colossa, Sokurah miniaturise la princesse.
Seule la coquille d'un œuf de l'oiseau Roc pourra rendre à Parisa sa taille normale. Or l'oiseau en question ne vit que sur l'île maudite. À l'aide d'un équipage composé de marins patibulaires, Sinbad s'embarque pour y retourner, mais l'aventure ne fait que commencer (1). Certes, aujourd'hui, le film de Nathan Juran compte presque soixante longues années au compteur.
Et pourtant, on tient sans aucun doute la meilleure aventure de Sinbad transposée au cinéma. Si, à juste titre, les contempteurs pourront tonner et clabauder, à raison, après des effets spéciaux un brin obsolètes - stop motion oblige - les esprits les plus indulgents s'émerveilleront devant la qualité de ce spectacle féérique et résolument enfantin. La grande force du film de Nathan Juran est de rompre littéralement avec les productions homériques des années 1950, un tropisme symbolisé par Les Travaux d'Hercule (Pietro Francesci, 1958) et sa figure de proue, Steve Reeves, impressionnant de robustesse.
Or justement, via son héros limite rachitique, Le 7e Voyage de Sinbad propose une autre rhétorique. Clairement, Kerwin Matthews, qui interprète le marin intrépide, n'est pas vraiment un colosse ni un body builder aguerri.
Mais le héros chétif puise son énergie ailleurs, notamment dans sa bravoure inextinguible, celle qui le poussera à sauver sa bien-aimée d'un malheureux sortilège et d'un surtout d'un vil magicien. Ainsi, les péripéties s'enchaînent sans temps mort et Ray Harryshausen, fidèle à son style inimitable, nous gratifie d'une belle galerie de créatures, toujours aussi impressionnantes pour l'occasion. Seul petit bémol, on pourra regretter le jeu un peu trop timoré et approximatif des deux acteurs principaux, donc le même Kerwin Matthews et sa compagne à l'écran, une certaine Kathryn Grant, qui se contente de répliquer béatement à son énamouré. A la rigueur, seul Torin Thatcher, qui cabotine à merveille dans le rôle d'un magicien machiavélique, permet de sauver l'interprétation de l'indigence intégrale.
Mais ne soyons pas trop sévères. On tient là un vrai classique de l'heroic fantasy qui, par ailleurs, peine réellement à cacher son statut de série B. Bref, une bisserie aussi ingénue que sympathique !
Note : 14.5/20
(1) Synopsis du film : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Septi%C3%A8me_Voyage_de_Sinbad