Genre : horreur, fantastique (interdit aux - 12 ans)
Année : 1993
Durée : 1h28
Synopsis : Une tronçonneuse greffée au poignet, un fusil à canon scié dans l'autre main, Ash, le héros des Evil Dead, remonte le cours du temps jusqu'en 1300. Là, il lui faut mettre la main sur le Nécronomicon, grimoire à l'origine de ses malheurs. Sa quête se transforme vite en effarante croisade, qui le mène à affronter une armée de squelettes.
La critique :
C'est par l'intermédiaire de son ami, Scott Spiegel, que Sam Raimi a découvert et s'est abreuvé du cinéma fantastique et horrifique. En témoignent ses premiers courts-métrages, entre autres Six Months To Live (1977), It's Murder ! (1977), Within the Woods (1978), ou encore Attack of the Helping Hand (1979) qui ne tardent pas àériger le talent de Sam Raimi aux producteurs avisés. En 1981, le cinéaste s'attelle à la réalisation de son tout premier long-métrage.
Ce sera Evil Dead, réalisé pour la modique somme de 350 000 dollars. Ses premiers pas dans le Septième Art se soldent immédiatement par un succès colossal. Si de prime abord, le film ne bénéficie pas d'une distribution dans les salles obscures, il s'impose rapidement via le support vidéo. En l'espace de quelques mois, Evil Dead premier du nom acquiert le statut de film culte.
Les thuriféraires du cinéma horrifique exultent. Non seulement, le film est un savant mélange de délires cartoonesques, de gore et de morts-vivants ressuscités par un livre démoniaque, mais le long-métrage impose un nouveau visage au cinéma, celui de Bruce Campbell, qui incarne Ash Williams. Pour l'acteur, son rôle dans Evil Dead lui ouvre les portes du cinéma bis. Après Mort sur le Grill (1985), Sam Raimi envisage sérieusement de réaliser une suite, soit Evil Dead 2 (1987) sous l'aval de Dino de Laurentiis. Déjàà l'époque, le célèbre producteur somme Raimi d'euphémiser ses ardeurs.
Mais le réalisateur n'en a cure et signe une pellicule horrifique encore plus portée sur le gore et les fantasmagories rutilantes. Que soit. Evil Dead 2 se solde derechef par un succès commercial et confirme l'aura de Raimi sur le cinéma d'épouvante.
La saga Evil Dead doit se conclure en apothéose via un troisième et inévitable chapitre, Evil Dead 3 : L'Armée des Ténèbres, sorti en 1993. Le film est toujours produit par Dino de Laurentiis malgré de nombreuses réticences. A nouveau, le producteur tente de minorer les velléités de Sam Raimi. Rétif, le metteur en scène entend enfin la requête de Dino de Laurentiis. De surcroît, Sam Raimi aspire à une autre ambiance beaucoup plus inspirée par le fantastique, l'heroic fantasy et la comédie funambulesque. C'est d'ailleurs la principale diatribe assénée àEvil Dead 3.
Pour certains adulateurs des deux premiers chapitres, Evil Dead 3 s'apparenterait davantage à une production hollywoodienne formatée, étriquée et stéréotypée dans laquelle se seraient fourvoyés Sam Raimi et Bruce Campbell.
Pourtant, en dépit de quelques compromis, ce troisième chapitre a de solides arguments à revendre. C'est ce que nous allons tenter d'analyser au cours de cette chronique. Hormis Bruce Campbell qui répond à nouveau à l'appel dans le rôle d'Ash Williams, la distribution du film se compose également d'Embeth Davidtz, Marcus Gilbert, Ian Abercrombie, Richard Grove et Bridget Fonda. Le scénario d'Evil Dead 3 reprend donc là où les choses s'étaient arrêtées dans le précédent volet.
Attention, SPOILERS ! (1) Avant même d'avoir eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait, Ash est fait prisonnier, emmené au château du seigneur Arthur et jeté en pâture à un monstre planqué au fond d'un puits. Après avoir clarifié la situation à l'aide de sa tronçonneuse et de son fusil, Ash se voit dans l'obligation de partir en quête du Necronomicon, seul ouvrage à contenir la formule capable de le renvoyer à son époque.
C'est en récupérant le livre après moult péripéties qu'il va réveiller l'armée des ténèbres (1). Avec le recul et les années, force est de constater que la saga Evil Dead, que ce soit la trilogie, le remake ou encore plus récemment la série télévisée, n'a pas trop souffert de la vulgate hollywoodienne et de son merchandising. En dépit des multiples tentatives pour engoncer la franchise vers un plus large public, la marque Evil Dead est toujours restée fidèle à son esprit de jadis, celui qui ressuscite les morts de leurs sépulcres, celui qui transforme une main vengeresse en une tronçonneuse érubescente, ou encore celui qui transporte son héros Ash Williams dans un étrange paradoxe temporel.
Pour vaincre le Necronomicon et ses turpitudes, ce dernier doit lutter contre son armée méphistophélique. Pour Sam Raimi, c'est l'occasion ou jamais de rendre hommage à ce cinéma de jadis, celui de Ray Harryhausen avec ces créatures gargantuesques et ces squelettes grimés en chevaliers tortionnaires.
Jamais, la saga n'aura autant ressembléà un film hybride et protéiforme, rappelant les premières hâbleries de Peter Jackson (Bad Taste, Brain Dead et Meet The Feebles en particulier) et mélangeant savamment les pitreries de Tex Avery en son temps, ainsi que les anachronismes au fil du récit. Indubitablement, Sam Raimi préfère le cinéma fantastique au cinéma horrifique. Le temps de quelques bagarres, Ash Williams se transmute en une figure version masculine d'Alice au pays des merveilles.
Dépassé par toutes les transformations et réincarnations qu'il subit, le héros hagard finira par triompher de notre escouade de chevaliers aux figures putrescentes. Certes, les esprits chagrins pesteront et clabauderont après un scénario un brin famélique qui suit doctement son rythme de croisière. Certes, les fans invétérés des deux premiers essais tonneront après l'absence de gore qui tache et qui pique les yeux. En l'état, force est de constater qu'Evil Dead 3 remplit largement son office sans avoir cédéà l'appât du lucre. C'est déjà pas mal... Même mieux, on en redemande !
Note : 14.5/20
Alice In Oliver
(1) Synopsis du film sur : http://www.devildead.com/indexfilm.php3?FilmID=561