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964 Pinocchio (Pétage de plombs généralisé !)

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964-Pinocchio

Genre : Horreur, science-fiction, expérimental (interdit aux - 16 ans)

Année : 1991

Durée : 1h37

 

Synopsis :

964 Pinocchio est un androïde confectionné illégalement par un savant fou, et dont le but unique est de satisfaire les besoins sexuels de riches clientes. Jetéà la rue par sa "propriétaire", Pinocchio tombe par hasard sur Himiko, une sans-abri amnésique qui le prend sous son aile.

 

La critique :

Alors que l'année 2017, riche en chroniques diverses comparéà mes débuts, commence tout doucement à appartenir au passé, il fallait que je clôture cette année en beauté avec une dernière chronique portant sur un cinéma tout sauf accessible. Direction donc chez nos amis japonais qui n'ont plus rien à prouver en matière de pellicules outrancières et complètement explosées du bulbe. Oui, je pense que nous pouvons tous affirmer sur le blog que ce pays est "the place to be" pour ceux en quête d'expériences cinématographiques insolites, atteignant des hauteurs inégalées et inenvisageables chez nous. Viols, snuff movie, explosions de sang et d'organes, paraphilie, émétophilie, scatophilie, zoophilie, on en a tous vu des vertes et des pas mûres sur ce blog. Le Japon nous a, ainsi, fait prendre conscience d'une face cachée du septième art dont il pourrait bien être le porte-étendard. N'ayez crainte, je suis loin d'être un spectateur de ce genre d'abominations car ma morale et mon estomac ne seront sans doute jamais prêts pour visionner cela. Et le film d'aujourd'hui est loin de ces excès immoraux.

Exit le cinéma vomitif et bienvenue dans le cyberpunk japonais. Un courant qui reste assez méconnu quand on y pense mais qui n'est plus à présenter pour les cinéphiles curieux et adepte d'expériences incongrues. Dans le passé, le blog s'était attardéà la chronique de plusieurs oeuvres du genre, parmi lesquelles on retrouvera l'excellent et culte Tetsuo, l'emblème qui posa les bases du genre, mais aussi le terrifiant Rubber's Lover ou, à l'inverse, le mauvais Meatball Machine.
Il ne faut pas oublier que le cyberpunk est un genre délicat et que rare sont les réalisateurs à manier le genre. Aujourd'hui, un autre film du style rejoindra la bibliothèque de plus en plus conséquente du site, j'ai nommé964 Pinocchio. Un nom qui a le mérite de résonner en notre fort intérieur comme précurseur d'une expérience éprouvante. Derrière ceci se trouve Shozin Fukui, qui est justement le réalisateur du très bon et jouissif Rubber's Lover que je vous invite à visionner si ce n'est pas déjà fait, et dont il s'agit du premier métrage. Peu de choses à dire si ce n'est que, à sa sortie, il se fit rapidement connaître sur la Toile en se taillant une solide réputation. Etant un curieux personnage, amateur de ce genre de délire peu recommandable pour le commun des mortels, il n'en fallait pas plus pour me mettre en confiance et démarrer le visionnage.

964 Pinocchio (1991)_002

ATTENTION SPOILERS : 964 Pinocchio est un androïde confectionné illégalement par un savant fou, et dont le but unique est de satisfaire les besoins sexuels de riches clientes. Jetéà la rue par sa "propriétaire", Pinocchio tombe par hasard sur Himiko, une sans-abri amnésique qui le prend sous son aile. Tandis qu’elle lui apprend à retrouver un semblant d’humanité, l’ancienne personnalité d’Himiko remonte à la surface. De leur côté, les créateurs de Pinocchio quadrille la ville pour le retrouver.

Evidemment, il était amplement logique de ne pas trouver derrière cette pochette, un synopsis un minimum terre-à-terre. Fukui démarre donc rapidement les hostilités avec une courte séquence en noir et blanc où nous sommes invités à retrouver Pinocchio en compagnie de 2 nymphomanes dans une chambre glauque, juste histoire de mettre une certaine forme d'ambiance. Après quoi, le cinéaste met vite en évidence une sans-abri amnésique observant la société avec ses jumelles et qui croisera Pinocchio errant hagard après avoir été abandonné. Ce sera le début d'une relation de confiance devenant de plus en plus tendancieuse dans l'attirance que Himiko éprouve envers cet androïde.
Cette première partie permet déjà de mettre en place un certain contexte, loin de la débilité que certains auraient pu scander. A travers cet androïde, c'est l'occasion pour Fukui de mettre le doigt sur le problème récurrent de la sexualité et même des rapports homme-femme au sein d'une société japonaise déshumanisée. Cet androïde symbolisant cette entité mise au monde pour canaliser les pulsions sexuelles de femmes laissées pour compte et abandonnées par des hommes renfermés sur eux-mêmes et dans leur travail. 

On peut voir en 964 Pinocchio le reflet d'une société amorphe où le désir humain semble s'être volatilisé au profit d'éphèbes synthétiques remplaçant le désir charnel qu'éprouvent deux humains l'un envers l'autre. Avec un peu de recul, on se rend compte que Fukui annonçait le devenir de la société japonaise ayant recours à des relations réellement artificielles avec des robots. En farfouillant sur le net, on a tous pu assister à des photos de cyborg dont la ressemblance physique avec la vraie femme est troublante. Cyborgs dont la finalité est de remplacer la femme dans des relations où l'homme, pris dans son boulot, est incapable d'entretenir une vie familiale.
Dans le film, les rapports sont inversés mais les faits sont bien là. 964 Pinocchio est explicite dans son propos et dérange déjà dans son second niveau de lecture. La misère sexuelle, dans une société paradoxalement hyper-sexualisée, est détectable, palpable et concerne beaucoup plus de personnes (majoritairement des hommes, on ne va pas se mentir hein ?) que nous le croyons. 

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Tels deux parias rejetés par une société qui ne les comprend pas et n'a pas envie de les comprendre, Himiko et son androïde vivent une existence curieusement épanouissante. Dans le premier tiers du film, le réalisateur met en place une forme de love story entre laissés pour compte repliés l'un sur l'autre dans une bulle prolétarienne. Cependant, Fukui a des objectifs loin du bête film d'amour et c'est ainsi que Pinocchio va réveiller en elle une ancienne personnalité, lorsqu'il se découvrira d'étranges mutations. Leur love story va laisser la place à la folie la plus totale vu que Himiko sombrera en pleine démence schizophrénique, alors que le savant fou enverra ses sbires retrouver l'androïde.
Le récit prend ainsi toute son ampleur dans un titanesque maelström de violence graphique et de montage épileptique. Loin des excès de Rubber's Lover ou même Tetsuo, le film peut quand même se parer de certaines séquences peu ragoûtantes à l'image du calvaire de Himiko dans un tunnel sombre vomissant une pâtée indigeste et finissant par se rouler dedans. Bonjour la fraîcheur !

Pinocchio n'hésitera pas de son côtéà nous gratifier de plusieurs vomis sanguinolents. Dans les deux derniers tiers du film, Fukui déstructure son récit façon machine à laver et fait se succéder dans des transitions brusques, toute une batterie de séquences, parfois sans grande logique entre elles. Les errances de Himiko rendue folle en alternance avec un Pinocchio agonisant dans des borborygmes assourdissants en sont un bon exemple. Il est donc tout à fait évident que 964 Pinocchio ne s'adresse pas seulement à un public averti mais aussi à un public ouvert d'esprit et sachant accepter l'expérimental dans toute sa splendeur. Il ne faut pas oublier que nous évoluons ici à contre-courant du cinéma classique, mais avais-je besoin de le rappeler ?
La folie contagieuse semble, dès lors, irréversible et contaminera tous les personnages principaux, donnant l'impression de se retrouver au beau milieu d'un simili Shutter Island. Le tout dans une ambiance glauque et oppressante qui permet à964 Pinocchio de se parer d'une réelle dimension d'épouvante d'un excellent rendu.

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On ne va, par contre, pas se mentir en faisant mention d'une esthétique loin d'être propice à se rincer les yeux. Tokyo ne nous a jamais paru aussi fade, aussi grise, aussi terne et ceci est à mettre en adéquation avec la lente déshumanisation de cette société se montrant, au final, aussi folle que les personnages principaux. La caméra a été pensée en deux temps. Dans le premier tiers, celle-ci se montrera remarquablement posée, alors qu'elle s'accaparera d'un rythme épileptique, bonne à foutre le tournis au spectateur et à le lessiver, arrivé au générique de fin.
Cependant, le point commun entre ces deux formes de mise en scène concernera des gros plans oppressants et omniprésents. Ceux-ci se focaliseront sur l'expression démoniaque et/ou tétanisée des personnages et contribuent beaucoup à la tonalité d'épouvante. Des personnages se parant d'une interprétation un peu trop grandiloquente mais de qualité. La palme est à décerner àOnn-chan interprétant cette Himiko complètement cinglée et réellement terrifiante. Haji Suzuki dans le rôle de l'androïde est assez remarquable. Enfin, les autres acteurs, que ça soit le savant fou ou la secrétaire adopteront aussi ce trait de folie dans la dernière partie. Au final, on sera assez épaté de voir que ce jeu d'acteur est tout sauf propice à faire rire, au vu du contexte, de leur regard glacial et de leur sourire psychopathique. Pour ce qui est de la bande sonore, celle-ci est de qualité, mêlant mélodies synthétiques et bruits stridents et industriels. 

En conclusion, il est évident que 964 Pinocchio ne sera pas le film à recommander aux profanes du cinéma, même lors d'une soirée arrosée qui leur fera plus donner l'envie de vomir au vu d'une caméra aux relents parkinsoniens en 1000 fois plus convulsivant. Pourtant, il est indéniable que Fukui démontre, dès son premier travail, une certaine érudition derrière la caméra, un certain style et qu'il sait manier intelligemment le genre en l'entourant d'un halo pessimiste et amer de la condition sociale japonaise. Si l'on pourra pester sur un bordel un peu trop abscons par moment, compte tenu des classiques du cyberpunk qui parvenaient à coupler dégénérescence et une relative facilitéà suivre le rythme, le pari est plus que réussi. Il faudra, cependant, attendre 5 ans avant que Fukui ne nous assomme avec son chef d'oeuvre détonnant du nom de Rubber's Lover triturant l'âme du spectateur façon mixer.
Ainsi s'achève ma dernière chronique de l'année. Je tiens à tous vous remercier pour vos encouragements et l'intérêt que vous avez portéà mon travail. Malheureusement, à moins d'un miracle, mes chroniques ne seront pas de retour avant les derniers jours de janvier, compte tenu d'une session d'examen sans temps mort. Bref, un OFNI de bonne qualité mais parfaitement non notable !

 

Note :???

 

 

orange-mecanique.  Taratata


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